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LA SAUVAGE.

Que trouve l’Indien sous ses pas taciturnes ?
Et ces bruits du désert, dans la plaine entendus,
Est-ce un soupir dernier des royaumes perdus ?
Votre nuit est bien sombre et le vent seul murmure.
— Une peur inconnue accable la nature.
Les oiseaux sont cachés dans le creux des pins noirs.
Et tous les animaux ferment leurs reposoirs
Sous l’écorce, ou la mousse, ou parmi les racines,
Ou dans le creux profond des vieux troncs en ruines.
— L’orage sonne au loin, le bois va se courber.
De larges gouttes d’eau commencent à tomber ;
Le combat se prépare et l’immense ravage
Entre la nue ardente et la forêt sauvage.

II.

Qui donc cherche sa route en ces bois ténébreux ?
Une pauvre Indienne au visage fiévreux.
Pâle et portant au sein un faible enfant qui pleure ;
Sur un sapin tombé, pont tremblant qu’elle effleure,
Elle passe, et sa main tient sur l’épaule un poids
Qu’elle baise ; autre enfant pendu comme un carquois.
Malgré sa volonté, sa jeunesse et sa force,
Elle frissonne encor sous la pagne d’écorce.
Et tient sur ses deux fils la laine aux plis épais,
Sa tunique et son lit dans la guerre et la paix.
— Après avoir long-temps examiné les herbes
Et la trace des pieds sur leurs épaisses gerbes
Ou sur le sable fin des ruisseaux abondans,
Elle s’arrête et cherche avec des yeux ardens
Quel chemin a suivi dans les feuilles froissées
L’homme de la Peau-Rouge aux guerres insensées.