Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 2.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
223
DU MONOPOLE DE L’INDUSTRIE DES TABACS.

dans le reste de l’île de Cuba n’est pas connu, mais ces fabriques produisent un nombre immense de cigares. C’est de cette île et surtout de la Havane que provient la plus grande partie des cigares consommés dans le monde entier.

La Havane récolte annuellement environ 3 millions de kilog. de tabac en feuilles ; elle en exporte le douzième, c’est-à-dire 250 mille. Elle exporte en outre au moins 200 millions de cigares, ainsi répartis :

États-Unis 
100 millions
Angleterre 
50
Espagne 
20
France 
10
Villes anséatiques et autres contrées d’Europe 
20

La récolte annuelle du reste de l’île s’élève à 1,840,000 kilog. de tabacs en feuilles ; elle exporte environ les 4/5 de ce produit, et en outre un nombre considérable de cigares, qui sont moins estimés que ceux de la Havane. Porto-Ricco et la terre ferme exportent aussi une assez grande quantité de tabac ; mais les planteurs y sont encore de plus mauvaise foi qu’à Cuba. Ils refusent toujours de faire droit aux nombreuses réclamations que suscitent le plus souvent leurs envois, et on ne peut mettre trop de circonspection dans les marchés que l’on conclut avec eux. C’est de la terre ferme que proviennent les tabacs de Varinas, dont on fait pour la pipe un grand usage en Hollande et en Allemagne.

Ainsi, en Amérique, le tabac est une source non pas de revenu pour les gouvernemens, mais de richesse pour l’agriculture et l’industrie particulière. On y cultive le tabac non pas seulement pour la consommation intérieure, mais principalement pour l’exporter dans le monde entier. On ne cherche pas à grever d’un impôt une plante qui est un des plus beaux produits du pays et une des principales branches de son commerce. L’Europe, malgré la transplantation générale du tabac qui y a été faite, ne saurait s’affranchir complètement du tribut qu’elle doit payer à l’Amérique pour ses tabacs, dont la supériorité est incontestable. On conçoit donc que les états d’Europe n’ont pas le même intérêt que ceux d’Amérique à protéger ce genre de consommation, et on comprend qu’ils l’aient frappé d’un impôt particulier. Cependant il y a treize états d’Europe où l’industrie du tabac est laissée à la libre concurrence : ce sont le Danemark, la Suède, la Norvége, la Russie, la Hollande, la Belgique, le duché de Bade, le Wurtemberg, le grand duché de Hesse, le grand duché de Nassau, la Saxe, la Suisse (moins le Valais), et la Hongrie. La culture, la fabrication et la vente des tabacs n’y sont soumises à aucun contrôle ni à aucunes restrictions spéciales. L’industrie du tabac y jouit des mêmes libertés et est soumise aux mêmes règlemens que toutes les autres industries, Il en résulte que l’impôt ne consiste, pour ces états, que dans le chiffre total du droit d’importation et du droit de patente