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tudes portent le même caractère. Il y a quelque cent ans, plusieurs hommes du clan des Macleods débarquèrent dans la petite île d’Eig, et insultèrent les habitans, qui les garrottèrent dans leur barque et la lancèrent en pleine mer. Recueillis par quelques-uns de leurs compatriotes, qui rencontrèrent l’embarcation, ils appelèrent à eux tout leur clan, et revinrent en force assaillir l’île. Les Eigiens, qui étaient en petit nombre, se réfugièrent, hommes, femmes et enfans, dans une caverne de deux cent cinquante pieds de long sur quatorze de large, dont l’ouverture est tellement étroite, qu’on ne peut s’y glisser qu’en marchant sur les pieds et sur les mains. Un seul habitant avait refusé ce moyen de salut, et était resté sur la cime d’un roc. Les Macleods, ne trouvant d’abord personne brûlèrent et pillèrent les habitations ; ils allaient se rembarquer, lorsqu’ils aperçurent cet habitant isolé, qui prit la fuite à leur arrivée ; l’empreinte de ses pas sur la neige les conduisit jusqu’à la bouche de la caverne. Là ils entassèrent des branchages, des feuilles sèches et des mousses auxquelles ils mirent le feu ; toute la population de l’île fût étouffée par la fumée. « On y voit encore, dit M. Wilson, la chevelure d’un enfant, les ossemens des victimes, et le sol est recouvert d’une matière adipocireuse, dernier débris de tous ces cadavres consumés par le temps. »

Vous diriez que des hyènes sous forme humaine ont habité jusqu’aux derniers temps cette ceinture de rochers. En 1745, les Clanranalds de Glengarry, ayant à se venger des Mackenzie, mirent le feu à l’église et y brûlèrent toute une congrégation pendant le service divin ; l’église flambait, le joueur de cornemuse du clan (piper) dansait autour de l’incendie et jouait sur son instrument sauvage l’air de triomphe connu depuis cette époque sous le nom de Chant des Glengarries. On peut juger par ces détails du farouche intérêt que présentent ces deux volumes[1].

Un autre Wilson, beaucoup plus célèbre et qui appartient à la grande génération des Byron et des Scott, le docteur Robert Wilson, auteur de la Ville de la Peste (the City of the Plague), vient de publier la collection de la plupart des articles de critique et de philosophie insérés par lui dans le Magasin de Blackwood. Il a eu raison de ne pas livrer au souffle des vents ces feuilles sibyllines. Wilson n’est assurément ni le plus pur, ni le plus concis, mais c’est l’un des plus brillans écrivains de la dernière époque. Diderot et Jean-Paul, Sterne et Charles Nodier, semblent avoir contribué à former

  1. A Voyage around the coast of Scotland and the Isles, by James Wilson.