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DE LA SITUATION
DU
THÉÂTRE EN FRANCE
À PROPOS
DE LA TRAGÉDIE DE LUCRÈCE.

J’ai toujours pensé, et je pense plus que jamais, qu’un grand succès au théâtre (pourvu qu’il soit sincère et loyal) est un de ces évènemens glorieux et rares qu’il convient de saluer avec joie et d’étudier sous toutes les faces. N’est-ce pas une chose pleine d’intérêt que d’assister aux premiers pas d’un nouveau talent, d’entendre les premiers sons d’une jeune lyre ? N’est-il pas heureux et encourageant pour tous de sentir que, dans ce siècle que l’on dit si blasé, il existe encore assez de sève admirative et de poésie latente au cœur de la foule, pour pouvoir, à un moment donné, répondre par une explosion d’enthousiasme à un grand et sérieux effort ? — Je vais plus loin. L’adhésion populaire donnée à une œuvre d’art est le plus sûr et le plus délicat indice des changemens survenus dans le goût, c’est-à-dire dans la raison et dans l’imagination des peuples ; c’est la révélation et la mesure actuelle des nouveaux instincts poétiques qui se développent sourdement au sein des masses ; c’est la