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Page:Revue des Deux Mondes - 1843 - tome 2.djvu/940

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REVUE DES DEUX MONDES.

deux nations sont intéressées à rendre leurs communications aussi actives que possible, car elles ont encore beaucoup à s’apprendre réciproquement. Dès qu’on touche le sol britannique, on sent qu’on entre dans un monde nouveau, très différent du nôtre, opposé même sous bien des rapports. Quand on y a séjourné quelque temps, on s’aperçoit que les différences sont moins profondes qu’elles n’avaient paru d’abord ; on comprend qu’un travail se fait en Angleterre comme en France pour rapprocher l’état social, moral et politique des deux pays. Mais ce qui domine encore, c’est la différence. La comparaison entre Londres et Paris est naturellement ce qui préoccupe le plus un observateur français dans la capitale de l’Angleterre ; à tout instant, on est frappé par des oppositions ou par des analogies. Je vais raconter mes impressions simplement, naturellement, comme elles me sont venues, mêlant ce qui est permanent avec ce qui est passager, et ce qui caractérise le spectacle de l’Angleterre en général avec ce qui est propre au mois où je l’ai vue.

Parlons d’abord, en peu de mots, de l’aspect matériel. L’aspect matériel de Londres a des ressemblances et des différences avec celui de Paris. Les deux villes sont bâties sur la rive septentrionale du fleuve qui les arrose ; un grand faubourg, le bourg de Southwark, occupe à Londres l’autre rive de la Tamise, comme le faubourg Saint-Germain occupe l’autre rive de la Seine à Paris. Seulement le faubourg de Londres est industriel, tandis que le faubourg de Paris est scientifique et administratif ; les usines remplacent à Southwark les écoles et les autres établissemens publics du quartier d’outre-Seine. Dans les deux villes, il y a une Cité, noyau originaire et primitif qui a produit ensuite un développement gigantesque ; mais la vie des affaires est demeurée dans la Cité de Londres, c’est encore là qu’est le siége de l’activité commerciale, tandis qu’à Paris la Cité proprement dite a perdu toute son importance. Il est vrai que les quartiers de Saint-Denis et de Saint-Martin peuvent être considérés comme les appendices immédiats de la Cité de Paris, et que là aussi le commerce s’est conservé et a grandi ; mais il y a loin de cette activité, si grande qu’elle soit déjà et si rapide que puisse être son accroissement, à l’immense agitation d’hommes, de capitaux et de marchandises qui fait de la Cité de Londres le centre commercial du monde entier.

La ville neuve, la capitale, est située, à Londres comme à Paris, à l’ouest de la Cité. La belle rue qui longe la Tamise et qui joint les nouveaux quartiers aux anciens, le Strand, peut être comparée