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eux l’audace des esprits entreprenans, et des concessions imprudentes, qui allaient jusqu’à tolérer la violation manifeste des lois, au lieu de leur inspirer de la reconnaissance et de la modération, ne firent que les exciter à exiger encore plus et à reprendre le ton de la menace et de l’agression. M. Cousin terminait ainsi ce discours en quelque sorte prophétique : « L’Université n’est point l’ennemie de l’église ; elle en est l’amie, elle en est l’alliée ; mais enfin elle n’est point l’église. Depuis Gerson jusqu’à Rollin, elle s’est toujours honorée d’être gallicane ; mais elle n’a jamais été, elle ne sera jamais jésuitique. L’Université nouvelle connaît et sa situation et sa mission ; elle est de son siècle : elle ne demande ni priviléges injustes pour elle, ni proscription des écoles privées et rivales ; elle les appelle toutes au contraire à servir avec elle la grande cause, la cause sacrée de l’éducation de la jeunesse ; elle ne réclame qu’une seule chose, à savoir l’égale exécution des lois, et particulièrement de celles dont la garde lui est confiée. » Le nouveau volume de M. Cousin renferme un certain nombre de lettres inédites de Mme de Longueville ; M. Cousin y a joint un commentaire où une critique élevée et fine à la fois met heureusement en relief les grandes qualités de style et de pensée de ce siècle, qui est déjà pour nous, comme il l’a dit ailleurs, une seconde antiquité. Ces lettres, qu’il donne ici pour la première fois, lui servent d’occasion pour distinguer deux parties dans le XVIIe siècle, celle de Richelieu, de Descartes, de Corneille et de Pascal, et celle qui est plus particulièrement l’œuvre de la cour de Louis XIV, et dont Racine est l’expression la plus accomplie. Nous signalerons encore le morceau intitulé Kant dans les dernières années de sa vie, et la biographie si noble et si touchante de Santa-Rosa, que les lecteurs de cette Revue n’ont pas oubliée. Ainsi, la variété, le nombre, l’importance des morceaux que contient ce recueil, et avec cela le style et le nom de M. Cousin, en voilà plus qu’il ne faut pour assurer aux Fragmens littéraires le succès du mémoire sur Pascal.


— Jasmin, le poète gascon, dont la muse originale a été si bien reçue l’année dernière dans les salons de Paris, vient de publier à Agen une nouvelle édition du premier volume de ses Papillotes : c’est ainsi, comme on sait, qu’il appelle gaiement ses poésies, par allusion à son métier de coiffeur. Maître Adam, le fameux menuisier de Nevers, n’appelait-il pas aussi ses vers des chevilles ? Ce premier volume est dédié à M. Sainte-Beuve, comme le second à M. Charles Nodier. L’auteur y a fait entrer un choix de ses premières poésies, et en particulier ses Souvenirs, son chef-d’œuvre, et il y a de plus ajouté quelques pièces nouvelles, dont quelques-unes lui ont été inspirées par ses succès de Paris. Nous avons remarqué, parmi ces dernières, la dédicace à M. Sainte-Beuve, le poème intitulé Mon Voyage à Paris, les vers adressés à Mme de Rémusat, ceux à M. Léonce de Lavergne, etc. Nous avons aussi notre part dans ces témoignages de la reconnaissance du poète ; Jasmin