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tendu les grammairiens, et s’il fallait croire avec eux que les drames satyriques des Romains étaient uniquement les fables atellanes. Qu’il y ait eu quelques analogies entre les deux genres, qui offraient plus d’un trait de ressemblance, qui surtout admettaient également certains personnages bouffons, toujours les mêmes, le premier Silène et les satyres, le second son Maccus et son Bucco ; qu’ils aient été, l’un à l’égard de l’autre, dans la même relation où se trouvait la comédie traduite ou imitée du grec, et la comédie traitant des sujets romains, la fabula crepidata et la fabula prœtexta, on peut le concevoir ; mais ce qui ne se concevrait pas aussi facilement, c’est que Vitruve eût dessiné pour l’atellane la scène satyrique, c’est qu’Horace, dans sa poétique du drame satyrique, eût voulu écrire les règles de l’atellane. Faut-il regarder et la description de Vitruve et la définition d’Horace comme s’adressant aux Grecs et non pas aux Romains, ou bien les prendre pour un conseil indirect donné à ces derniers, de suivre plutôt les exemples des Grecs que ceux du pays des Osques ? Ces explications sont ingénieuses, je n’en disconviens pas, mais bien forcées, et il me paraît plus naturel d’admettre que, dans l’universelle reproduction de la littérature grecque par les Romains, le drame satyrique n’a pas été oublié, bien qu’aucun débris, presque aucune trace ne l’atteste. Il suffirait de ce vers :

Agite, fugite, quatite, Satyri !

s’il était plus sûr qu’on n’y doit pas voir un exemple de métrique arbitrairement forgé par le grammairien lui-même qui le rapporte. Étaient-ce des drames satyriques que ce Lycurgue de Nævius, dans lequel Silène avait un rôle ; que ces comédies de Sylla, traitées de satyriques par Athénée ? Il est permis d’en douter. Le frère de Cicéron, ce tragique amateur, a-t-il imité la petite pièce dans laquelle Sophocle avait trop gaiement représenté le repas des généraux grecs ? Le passage de la correspondance de l’orateur qui a paru l’établir n’a pas malheureusement toute la clarté désirable. Il y a moins de doutes, ce me semble, au sujet de l’Atalante, du Sisyphe, de l’Ariane, attribués par l’un des scoliastes d’Horace, sous le titre de drames satyriques, à Pomponius, probablement Pomponius Secundus, tragique romain, célèbre sous les règnes de Caligula et de Claude. On souhaiterait toutefois à ce fait un garant d’une autorité plus irrécusable. Le personnage bouffon que remplit Silène dans les Césars de Julien se rapporte bien aux souvenirs du drame satyrique des Grecs, mais ne fait pas de cet ouvrage un drame satyrique proprement dit. Con-