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POLITIQUE COMMERCIALE DE L’ANGLETERRE.

Londres, qui formulait en termes très remarquables le symbole économique auquel l’industrie et le commerce anglais allaient se rallier. En 1826, M. Huskisson, pour justifier ses réformes, relisait encore en entier cette pétition devant la chambre des communes. On a dit et souvent répété en Angleterre, que cette pétition a été le signal d’une ère nouvelle dans la législation commerciale du royaume-uni ; il importe donc d’en bien saisir le sens[1]. À travers les principes généraux qu’elle expose, il n’est pas difficile de démêler les mobiles particuliers qui l’ont suggérée. L’abaissement des droits de douane y est réclamé, non pour l’application désintéressée d’abstraites théories, mais en réalité au nom des grandes et solidaires nécessités qui dominent, depuis la paix, la situation économique de l’Angleterre. Le trait caractéristique de cette situation, c’est-à-dire la

  1. « Le commerce extérieur, disaient les pétitionnaires dans ce document, qu’il faut citer comme l’un des plus intéressans de l’histoire économique de l’Angleterre, est du plus haut intérêt pour la prospérité de ce pays. C’est par ce commerce en effet que nous tirons du dehors les marchandises que le sol, le climat, le capital, l’industrie des autres contrées les met à même de fournir à de meilleures conditions que nous, et qu’en retour nous exportons celles à la production desquelles notre situation spéciale nous donne plus d’aptitude.

    « L’affranchissement de toute restriction doit donner la plus grande extension au commerce extérieur et imprimer la meilleure direction possible au capital et à l’industrie de ce pays.

    « La maxime que suit chaque négociant dans ses affaires privées : acheter dans le marché le moins cher et vendre dans celui où le prix est le plus élevé, doit être strictement appliquée au commerce de la nation tout entière.

    « Une politique fondée sur ces principes ferait du commerce du monde un échange d’avantages mutuels et répandrait parmi les habitans de chaque contrée un accroissement de richesse et de bien-être.

    « Malheureusement une politique contraire a prévalu et est encore pratiquée par le gouvernement de ce pays et les états étrangers. Chaque pays s’efforce d’exclure les productions des autres contrées, sous le prétexte d’encourager les siennes. Ainsi, chaque pays inflige à la masse de ses habitans qui sont consommateurs la nécessité de subir des privations sur la quantité ou la qualité des marchandises, et fait de ce qui devrait être une source de bénéfices réciproques et d’harmonie entre les états une occasion toujours renaissante de jalousie et d’hostilité.

    « Les préjugés régnans en faveur du système prohibitif ou restrictif peuvent être attribués à la supposition erronée que toute importation de marchandises étrangères diminue et décourage d’autant notre propre production ; mais il est très facile de réfuter cette opinion : il ne peut y avoir importation pendant une certaine période de temps sans une exportation correspondante directe ou indirecte. Si une branche de notre industrie n’était pas en état de soutenir la concurrence étrangère, ce besoin d’exportation encouragerait donc davantage les productions pour lesquelles nous aurions plus d’aptitude, et ainsi un emploi au moins égal,