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tenir notre capital, notre travail, notre habileté. S’il est vrai que nous abordions la lutte avec quelques élémens de supériorité, nous avons aussi à faire face à des désavantages considérables et croissans. Nous exportons plus ou moins de tous les produits de nos manufactures, et les productions de notre sol ne suffisent pas à nourrir notre population, car nous ne pourrions passer plusieurs années sans demander du blé à l’étranger, et nous avons une importation annuelle considérable de beurre, de fromage, etc. Notre législation sur les céréales, quoique convenable pour prévenir d’autres maux, pèse comme une charge, comme une restriction, sur l’industrie et le commerce. Or, tandis qu’il faut que les produits de cette industrie s’abaissent au niveau des prix du marché général du monde, nos producteurs ne participent pas, pour leur nourriture, aux avantages de ce niveau. Si le prix des subsistances, c’est-à-dire des articles que nous n’exportons jamais, et que nous sommes souvent forcés d’importer, est matériellement plus élevé ici que partout ailleurs, cette cherté ne peut influer sur le prix des articles que nous exportons, elle doit retomber par voie de déduction, soit sur le salaire et le bien-être des ouvriers, soit sur les profits de ceux qui les emploient. De là, une lutte permanente entre les profits du capital et les profits du travail, lutte dont l’effet constant est d’abaisser le niveau des uns et des autres ; car l’inconvénient sous le poids duquel ils combattent s’accroît à mesure que les manufactures rivales de l’étranger tendent davantage, par leurs progrès, à égaler les nôtres[1]. »

Il fallait évidemment, pour corriger cette situation, faire disparaître ou atténuer les causes factices de l’exagération des prix des grandes consommations et de la diminution des profits. Plusieurs années auparavant, en 1821, M. Huskisson le conseillait à une commission de la chambre des communes. « Vous ne pouvez vous dissimuler, disait-il, que, la somme nominale des impôts demeurant la même, le poids cependant, depuis la paix, doit en être devenu plus lourd à supporter dans la proportion de la diminution de revenu éprouvée par les capitaux engagés dans l’agriculture, le commerce et l’industrie. Il ne faut donc épargner aucun effort pour diminuer ces charges. » Mais en 1830 toutes les réductions possibles sur les dépenses publiques avaient été opérées ; la situation n’était pourtant pas meilleure : il fallait aller plus loin encore. « Puisque le chiffre

  1. Speeches, tome III, page 542. — Exposition of the state of the country (March 16,1830).