gnèrent à Paris, avec Napoléon, ce traité de la confédération du Rhin où ils déclarent que la constitution germanique est impuissante désormais à protéger l’Allemagne. Après cela, que devait faire l’empereur François II ? Il devait descendre de ce trône condamné et déposer la couronne de Charlemagne. C’est ce qu’il fit, et, avec simplicité, dans un langage triste et digne, il annonça aux peuples allemands que les destinées de l’empire étaient finies. Le même jour, la ville de Vienne se démit aussi de sa souveraineté, et cessa de rien représenter de grand en Allemagne ; car qu’avait-elle représenté jusque-là, si ce n’est la majesté impériale qu’une longue possession semblait lui avoir inféodée ? Le traité qui fit disparaître le saint-empire condamna Vienne à n’être plus que la ville des souvenirs et des regrets, la ville des traditions et du passé : il lui enleva le présent et l’avenir.
Je ne tomberai pas dans des lieux communs, je ne répéterai pas les accusations qu’on élève sans cesse contre l’Autriche ; je ne craindrai même pas d’affronter bien des préjugés qu’on a répandus en France sur ce pays, je reconnaîtrai de grand cœur tout ce qu’il y a de paternel dans son gouvernement : j’admirerai, si l’on veut, la science, l’habileté, la régularité de son administration ; mais il sera toujours permis de demander à l’Autriche comment elle pourrait représenter l’Allemagne. Le problème peut être posé très nettement. L’Allemagne du moyen-âge était tout entière dans la puissance impériale, dans l’empire d’Othon et de Barberousse. Mais le moyen-âge a succombé en Allemagne comme en France. Or, comment l’Allemagne s’est-elle fait connaître au monde moderne ? comment est-elle entrée dans le cortége des nations nouvelles ? quel caractère y a-t-elle apporté ? Ce qui l’a distinguée, dès l’origine, c’est la vie de l’intelligence, c’est cette puissance de contemplation, de réflexion, de pensée, qui a semblé son privilége. Voilà ce qu’elle a apporté dans l’œuvre commune des nations européennes, voilà sur quel signe souverain elle y a été saluée, in hoc signo vinces. Si donc l’ancienne Allemagne était représentée par le pays qui possédait la dignité impériale, le peuple qui présidera aux destinées de l’Allemagne moderne sera celui qui osera prendre en main ce sceptre des idées, plus précieux et plus sacré que l’autre, et fonder chez lui le saint-empire de l’intelligence et de la pensée. Mais si l’on voit des états se transformer volontairement selon certaines circonstances, on ne les voit pas changer tout à coup de nature et recommencer de nouvelles destinées en un sens opposé au génie qui leur est propre.