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brillent les grandes qualités et les vertus sincères. Quand l’église a eu des hommes de foi et de génie capables de construire et de développer le dogme, ils ont aussi su le défendre ; c’est en grande partie par la polémique que la théologie catholique s’est fondée. Au moyen-âge, des luttes célèbres ont honoré l’église et la philosophie. Plus tard, la tradition et la hiérarchie catholiques, attaquées par la réforme avec impétuosité, ont été défendues avec éclat. Alors les débats étaient grands, parce que la doctrine était forte. Aujourd’hui que voyons-nous ? Quels sont les champions de l’église ? Quelques libellistes, clercs et laïques, qui se sont fait de l’injure une cynique habitude, et qui perdent aux yeux des honnêtes gens la cause dont ils se portent les soutiens. Vous trouvez dans ce qu’ils écrivent l’élégance de Tabarin s’alliant à tout l’atticisme des sacristies.

Déplorable spectacle, tant pour ceux qui ont la foi que pour tout homme qui n’a que de la raison et du goût. Autrefois l’église de France était la gardienne non-seulement de l’orthodoxie catholique, mais des saines doctrines littéraires. Les écrits qu’elle produisait ou ceux qu’elle avouait se faisaient remarquer par une politesse grave, par le respect de toutes les convenances. Aujourd’hui il suffit à un homme d’annoncer qu’il parle au nom de l’église pour se croire autorisé à toutes les violences du langage. On dirait qu’on met la plume à la main à des échappés de séminaire qui, sans rien connaître, ni la vie, ni les lettres, ni le monde, sont déchaînés contre ce que la société et la science ont de plus recommandable et de plus distingué. Que l’église y songe : en continuant à approuver tous ces déportemens, elle confirmerait l’opinion qu’il y a dans certaines parties du monde ecclésiastique une grossièreté, une ignorance que rien ne saurait ni adoucir ni dissiper. Nous savons que des membres honorables du clergé voient ces excès avec chagrin, mais ils n’osent les réprouver hautement. Les fous intimident les sages, et, ce qui est plus triste encore, ils trouvent jusque dans l’épiscopat des voix non-seulement pour les défendre, mais pour les glorifier. M. l’évêque de Chartres loue les odieux pamphlets sortis de la fabrique de Lyon ; il les loue contre l’avis de son métropolitain, en rappelant à M. l’archevêque de Paris, avec une humilité tout-à-fait édifiante, que saint Pierre lui-même, quoique placé à la tête de toute l’église, fut repris par un inférieur. Le fait est exact. Il fut dit une fois à saint Pierre qu’il ne marchait pas selon l’Évangile ; mais qui lui adressait cette réprimande ? Saint Paul, celui que Bossuet appelle le divin apôtre et l’incomparable docteur des gentils. Nous nous trompions, vraiment,