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REVUE. — CHRONIQUE.

tons sur sa longue expérience et sur sa profonde connaissance des choses de l’enseignement. Il ne s’agit pas de gagner une bataille, mais de concilier en homme grave et consciencieux de grands intérêts, des forces sociales qui devraient toujours s’entr’aider et ne jamais se combattre.


À mesure que la France agrandit la sphère de son activité commerciale, elle se met dans la nécessité d’augmenter ses forces maritimes. Fonder des établissemens coloniaux, ouvrir des marchés extérieurs sans proportionner la puissance navale d’un pays au développement de ses spéculations lointaines, ce serait une déplorable contradiction. Notre ministère de la marine doit donc, par la force des choses, devenir une de nos administrations les plus considérables et les plus actives. Les mesures, qui ont signalé l’avénement du nouveau ministre nous font espérer que M. de Mackau ne faiblira pas sous la responsabilité qu’il accepte. Ce serait peu que la connaissance exacte de la spécialité qui a dignement occupé sa vie, si elle n’était éclairée par une expérience générale des hommes et des affaires de son temps. M. de Mackau sait qu’une légitime défiance accueille aujourd’hui ces grands programmes de réformes dont le premier effet est d’imposer au budget un surcroît de charges, et qui n’aboutissent trop souvent qu’à la création d’un service nouveau en faveur de quelques protégés. Les améliorations qu’il annonce dans sa circulaire du 9 octobre, adressée aux préfets maritimes, sont de celles qui, pour être réalisées, n’exigent que de l’énergie et de la vigilance. À une époque où l’on est trop porté à s’exagérer la puissance de l’argent, il faut applaudir à cette neuve et féconde parole de M. de Mackau : « L’économie est une puissance. »

Malgré la réserve qui distingue le rapport adressé au roi en date du 9 septembre, sur l’état financier du département de la marine, le simple énoncé des faits trahit une situation assez embarrassée. Les dépenses, qui depuis long-temps excèdent les prévisions du budget, ont constitué un déficit permanent auquel on a remédié jusqu’ici en amoindrissant les approvisionnemens qui devraient exister dans les magasins. L’effectif des bâtimens en service ou en disponibilité a été constamment au-dessus du nombre que les chambres ont pris pour base de leurs allocations. Par exemple, en 1843, au lieu de 164 bâtimens armés ou désarmés, dont mention est faite au budget, nous en avons 207, dont 192 armés ; l’excédant de dépenses occasionné par ce surcroît d’armement est évalué, pour la présente année, à 5,600,000 francs. La construction des paquebots transatlantiques, les frais de premier établissement pour l’organisation de ce service, dépassent de plusieurs millions les sommes accordées à cet effet par les chambres. Les rapports qu’il s’agit d’établir avec la Chine, la protection des intérêts français au Sénégal, ont également nécessité des dépenses exceptionnelles. En somme, au dernier renouvellement du ministère, le déficit avoué était de 13,163,000 francs. Or, M. de Mackau déclare, dans son rapport au roi, qu’on ne doit, en aucun cas, essayer de rétablir l’équilibre en affaiblissant notre état maritime, en désorganisant