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LA VIE ET LES ÉCRITS DE VANINI.

été engagé dans les ordres, car il avait fait des sermons. Arrivé en France, il séjourna quelque temps à Lyon et à Paris avant son fatal voyage à Toulouse.

C’est à Lyon qu’il publia, en 1615, son premier écrit, avec ce titre singulièrement emphatique[1] : Amphithéâtre de la Providence éternelle, magique et divin, chrétien et physique, astrologico-catholique, contre les anciens philosophes, les athées, les épicuriens, les péripatéticiens et les stoïciens, par Jules-César Vanini, philosophe, théologien, docteur en droit civil et en droit canon. Le livre est dédié à son excellence don François de Castro, ambassadeur d’Espagne auprès du saint-siége. Il est revêtu de l’approbation civile et de l’approbation ecclésiastique. Deux censeurs ecclésiastiques différens, l’un vicaire-général de l’archevêque de Lyon, l’autre professeur en théologie, prédicateur et délégué par l’archevêque, déclarent que l’écrit de Vanini ne renferme rien qui soit contraire à la foi catholique ; le dernier même y trouve « des raisonnemens pleins de force et de finesse, fondés sur la saine doctrine des théologiens les plus autorisés, » et il s’exprime sur le ton de l’admiration. Suivent les témoignages de diverses personnes, et des éloges en vers de l’ouvrage et de l’auteur. Que dire en vérité de ce cortége d’approbations, si l’Amphithéâtre est un monument d’impiété et d’athéisme ?

En apparence au moins, c’est tout le contraire. D’abord, quant à la religion, Vanini s’en porte partout le défenseur. Dans sa préface, il prétend avoir composé une apologie pour la loi mosaïque et chrétienne contre les physiciens, les astronomes et les politiques, ainsi qu’une apologie en dix-huit livres du concile de Trente contre les hérétiques. Ces écrits sont-ils réels ou supposés ? Nous l’ignorons. Toujours est-il qu’il les cite assez souvent. Il s’appelle lui-même « le fils de la sainte mère l’église catholique. » Il prétend qu’il a failli en Angleterre subir le martyre pour la foi, et qu’il serait mort bien volontiers pour une si belle cause. Il fait l’éloge de la société de Jésus, qu’il nomme « le palladium de l’église romaine, la colonne de toute religion, l’ancre du salut du genre humain. » Enfin, en parcourant attentivement tout le livre, je n’ai pas rencontré un seul mot qui démentît les approbations des deux censeurs lyonnais. Je n’y trouve de suspect que le ton emphatique et outré ; quelquefois même on pour-

  1. Amphitheatrum æternæ providentiæ, divino-magicum, christiano-physicum, necnon astrologo-catholicum, adversus veteres philosophos, atheos, epicureos, peripateticos et stoicos, auctore Julio Cæsare Vanino, philosopho, theologo, ac furis utriusque doctore ; Lugduni, 1615.