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Réforme Postale.

La commission chargée par la chambre des députés de l’examen de la proposition de M. de Saint-Priest sur la réforme postale n’a pas encore présenté son rapport. Cette commission ne saurait trop étudier l’importante question qui lui est soumise. En Angleterre, les comités de la chambre des communes qui sont saisis de pareils sujets font de véritables enquêtes qui embrassent tous les intérêts. Nous avons déjà dit ce que nous pensions d’une réduction dans le tarif des lettres. Aujourd’hui, nous allons aborder une autre face de la question ; nous voulons parler du service des articles d’argent. Une réduction notable du droit actuellement perçu sur les articles d’argent nous paraît indispensable, non-seulement, comme on le dit quelquefois, parce que ceux qui ont aujourd’hui recours à la poste pour envoyer ou recevoir de l’argent sont des pauvres, des ouvriers, des soldats, ce qui est bien pourtant une raison déterminante, mais encore par cet autre motif que, si le droit était considérablement diminué, des classes de la société qui aujourd’hui usent rarement de cette voie y trouveraient aussi désormais des avantages incalculables.

Un de nos collaborateurs, M. Léonce de Lavergne, a publié en 1838 une brochure sur le service des articles d’argent dans l’administration des postes et sur le parti qu’il serait possible de tirer de ce service pour en faire une véritable banque nationale de circulation. M. de Lavergne proposait de réduire le droit de 5 pour 100 actuellement perçu sur les sommes transportées par la poste à 1/2 pour 100, et il démontrait quelles heureuses conséquences cette réduction aurait pour le fisc d’abord, qui retirerait un plus grand revenu du service des articles d’argent, et ensuite pour le public, à qui ce transport d’argent à bon marché donnerait des facilités considérables. M. de Lavergne voyait dans les mandats sur la poste rendus ainsi accessibles à tous une nouvelle espèce de billets de banque payables dans tout le royaume, et qui auraient donné à notre pays ce qui lui manque, un signe uniforme de circulation.

Cette brochure fut remarquée par plusieurs journaux, qui en rendirent un compte détaillé. M. Rossi en fit l’objet du rapport le plus honorable à l’Académie des Sciences morales et politiques. Cependant on ne fit rien pour donner suite aux idées de l’auteur ; des objections furent élevées, au contraire, contre la possibilité d’exécution. Ceux qui confondent l’esprit de routine avec l’esprit pratique, et ils sont malheureusement nombreux en France, s’imaginèrent que des inconvéniens inconnus devaient nécessairement sortir de cette amélioration si simple et si facile en apparence. On parla vaguement de crise monétaire, de dangers de remboursement, de difficultés imprévues qui éclateraient à chaque pas, et le projet resta sans application.

Cependant les journaux anglais avaient eu connaissance de la brochure,