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REVUE LITTERAIRE.




POETAE MINORES[1]




M. H. de Latouche. — M. Jules Lefèvre. — M. Barthélemy.

Le meilleur moment pour juger un écrivain, de son vivant, c’est l’âge de sa maturité. Plus tôt, à ses débuts, il donne rarement sa mesure, il promet trop ou pas assez, de telle sorte qu’on peut entrevoir un grand homme là où il n’y a qu’une médiocrité au premier chef, ou bien qu’on court le risque de prendre un aigle pour un roitelet, ce qui arriva un jour à lord Brougham, de quoi Byron, comme on sait, lui garda rancune. — Plus tard, aux années du déclin, alors qu’il serait facile de traduire l’écrivain tout entier à la barre et de lui faire subir un interrogatoire motivé, il s’abrite derrière ses cheveux blancs, et si on a à dire quelques vérités un peu dures, il convient d’attendre jusqu’au lendemain, qui ne sera rien moins que la postérité. A l’entrée et à la sortie de la carrière, qu’on rencontre le jeune homme ou le vieillard, on est donc, pour des motifs différens, jusqu’à un certain point empêché, et les restrictions sont de mise ; mais après les débuts et avant la décadence, après les élans vigoureux de la jeunesse qui bouillonne et avant les derniers

  1. Il est entendu que minores n’est pas pris ici en mauvaise part : en critique littéraire comme en diplomatie, il y a les grandes puissances et les petites puissances, et il est important de ne pas les confondre.