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Simple Story, et dont M. d’Israeli a compris, lui aussi, avec une intelligente sympathie la suavité. Les tableaux d’intérieur qui ouvrent le livre sont d’une mélancolie touchante et vraie ; les scènes et les correspondances d’amour entre Henrietta Temple et Ferdinand Armyne sont exécutées avec une délicatesse et une pureté ravissantes ; la vie de Londres est crayonnée avec beaucoup d’entrain et d’esprit. D’ailleurs, sur quelques caractères que vous portiez vos regards, vous ne rencontrez que d’aimables figures, originales encore, malgré le rayon de bonté qui les illumine d’un charme commun. Je citerai, entre autres, le dévouement silencieux, la candide sollicitude du bon prêtre Gladstonbury ; la chevaleresque, la hardie, la sentimentale Henrietta ; le marquis de Montfort, ce type du lord anglais, si délicat dans sa générosité, si noblement contenu dans ses affections, vieille connaissance que l’on se souvient toujours avec plaisir d’avoir faite dans plusieurs des bons romans du XVIIIe siècle ; lady Belair, qui a vu toute l’histoire du grand monde anglais depuis le temps des jeunes années de Charles Fox, qui va partout encore malgré sa vieillesse, et dont le caquetage, spirituellement étourdi, noue et dénoue les difficultés de l’action ; enfin ce gentilhomme français, le comte de Mirabel, d’une gaieté, d’un entraînement infatigables, qui donne le ton à la jeunesse dorée de Londres, et dont il n’y a pas de témérité à soupçonner le modèle, puisque M. d’Israeli, son affectionné ami, a dédié Henrietta Temple à M. le comte d’Orsay.

Ce sont là, des antécédens de M. d’Israeli jusqu’à Coningsby, les seuls qui me paraissent mériter d’être rappelés. Quoique j’aie déjà récusé pour Coningsby la critique littéraire, si j’avais à lui assigner un rang dans l’œuvre de M. d’Israeli, je le placerais après Henrietta Temple, mais bien au-dessus encore des autres productions de l’auteur. Coningsby est un roman défectueux, presque sans action, envahi par des digressions complètement étrangères au développement de l’intrigue ; cependant, grace à la vivacité, à la limpidité du style, grace au tour piquant des conversations, grace même à la variété des épisodes et des portraits sous lesquels l’auteur fait oublier la trame insignifiante de sa fable, Coningsby se lit avec plaisir. Jetez les yeux sur la dédicace qui tient lieu de préface à ce livre, vous êtes loyalement prévenu, et vous serez doué d’une perspicacité singulière si vous vous attendez à lire un roman. L’auteur ne croit ces volumes dignes d’être offerts que « parce qu’il s’est efforcé d’y peindre quelque chose de l’esprit nouveau, et meilleur, ce lui semble, qui se développe en Angleterre. » « Son objet, continue-t-il, a été de répandre quelques idées qui puissent