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la Revue d’Edimbourg ; mais quand même Jeffrey n’aurait pas un peu contribué à lui inspirer cette idée, il est évident que celui-ci seul avait la force et l’énergie qu’il fallait pour diriger une pareille publication, et même empêcher quelle échouât avant que de paraître. Horner le fait assez entendre dans ses mémoires, sans les efforts de Jeffrey, elle n’aurait jamais vu le jour. « C’est vers la fin de l’hiver dernier, écrit-il en 1802 ; que le plan de la Revue fut arrêté entre nous trois, Jeffrey Sydney Smith et moi ; ce plan fut communiqué aussitôt à Murray, Allen, Hamilton. Quand à Brown, Brougham et les deux Thompson, ils donnèrent successivement leur : adhésion. »

Dès-lors : nous voyons Jeffrey occupé seul à recueillir les élémens de la première livraison. Au mois d’avril, cette livraison n’est guère avancée ; Jeffrey confie à Horner tous les embarras qu’il éprouve. « J’ai commencé ce matin l’article sur Mounier, lui mande-t-il ; malheureusement nous sommes en retard et nous laissons échapper quelques symptômes de découragement ; déjà l’on réclame contre la date fixée pour notre première apparition, et l’on semble à présent vouloir un délai qui pourrait bien nous être fatal. Cependant il y a quelque chose de fait, et plus encore, je l’espère, en voie d’exécution. Smith est parvenu à la seconde moitié de sa tâche ; Hamilton aussi. Allen a fait quelques progrès. Pour ce qui est de Murray et de moi, nous avons accordé nos instrumens, et nous sommes presque prêts à commencer. D’un autre côté, Thompson est malade ; Brown ne s’est engagé à examiner que les comédies de miss Baillie, et Timothée, loin de prendre aucun engagement, a déclaré l’autre jour qu’il croyait bien qu’il ne noircirait jamais de papier pour notre cause. Quant à Brougham, vous savez avec quel entraînement il accueillit d’abord notre idée et comme il nous promit, sans hésiter, de nous fournir au moins deux articles. Il y a quelques jours, je lui proposai deux ou trois ouvrages qui me semblaient, devoir lui convenir ; il m’a répondu très gaiement que son opinion n’était plus tout-à-fait la même à l’égard de notre entreprise, et qu’il était plutôt éloigné maintenant d’y prendre part. » Ce fragment de la correspondance de Jeffrey contient la liste à peu près complète des premiers écrivains de la Revue d’Edimbourg. Dans le nombre se trouvent des noms qui nous sont familiers ; d’autres sont moins connus généralement hors de l’Angleterre. Jeffrey, Brouham, Horner, à qui ses travaux sur les questions financières ont fait une réputation méritée, et qui entra dans la chambre des communes dès 1806, a l’âge de vingt-huit ans ; Murray, devenu lord avocat d’Écosse en 1836, puis juge de la cour de session (court of session) dans le