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croissant dans des terrains dont la nature et l’exposition différaient notablement. Il résulte de ses calculs que l’accroissement moyen annuel est par hectare d’environ 9 stères et demi de bois et de 100 fagots. Cependant M. Chevandier ne s’est pas contenté de ce fait général, il a recherché dans quelle proportion les forces de la végétation avaient fixé les élémens nécessaires à cet accroissement des arbres, et par-là il est arrivé à des résultats intéressans sous le double point de vue de la science et de l’agriculture.

En effet, notre auteur a trouvé que, dans l’espace d’un an, la forêt qui faisait l’objet de son travail acquiert par hectare 1,804 kilogrammes de carbone, 219 kilogrammes d’hydrogène, 1,546 kilogrammes d’oxygène, 34 kilogrammes d’azote, et 50 kilogrammes de substances salines qui forment les cendres. Toutes ces substances sont empruntées à l’atmosphère seule, car les feuilles qui entretiennent la fertilité du sol proviennent des arbres, et la forêt se fume elle-même. Or nous avons cherché à faire comprendre dans un article inséré en ce recueil[1] comment le problème si important de production des engrais pouvait en définitive se ramener aux termes suivans fixer par l’action des végétaux les élémens des substances organiques nécessaires à l’entretien de la vie chez les animaux. Nous avons rappelé, d’après les belles expériences de M. Boussingault, que la culture des topinambours était, sous ce rapport, une des plus avantageuses. Eh bien ! si nous mettons en regard le rendement des forêts avec celui que donnent cette plante et les assolemens les plus avantageux, nous trouverons que les topinambours conservent, il est vrai, leur supériorité, nais qu’ensuite la comparaison est tout à l’avantage de ces bois qui n’exigent pour ainsi dire aucun soin.. On en jugera par le tableau suivant, où sont réunis les chiffres représentant les produits moyens annuels d’un hectare de forêt, d’un hectare de topinambours, et d’un hectare cultivé d’après l’assolement usité à Hohenheim :


Carbone Hydrogène Oxygène Azote Centres
Topinambours 6,310 kil. 785 kil. 6,780 kil. 43 kil. 841 kil.
Forêts 1,804 219 1,546 34 50
Assolement 1,097 126 1,043 18 438

Faisons maintenant l’application de ce qui précède à quelques-unes de ces questions ardues que la science moderne cherche à résoudre, non plus, comme autrefois, par de simples hypothèses, mais bien à l’aide de déductions logiques appuyées sur des expériences positives. Cherchons quel rôle a de jouer la végétation dans ces âges reculés où la surface de notre globe, entourée d’une atmosphère surchargée d’acide carbonique, ne pouvait encore nourrir les espèces animales, et présentait en revanche d’immenses forêts dont les contrées tropicales peuvent seules, de nos jours, donner une faible idée.

  1. Tendances modernes de la Chimie.