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fonds, en ce sens du moins qu’une circonstance particulière à l’un doive nécessairement agir sur l’autre : aussi la dépression du 5, due à des motifs qui lui sont propres, ne saurait empêcher le 3, exempt des mêmes entraves, de s’élever au taux que lui assigne l’état du crédit.

On fait remarquer, il est vrai, que les cours de nos fonds publics, sans exception, sont inférieurs à ceux de l’Angleterre et de plusieurs autres états de l’Europe, et on en conclut que c’est la fausse situation du 5 qui pèse sur tous les autres. Le fait que l’on signale n’est que trop vrai ; mais ne trouve-t-il pas, dans l’état du pays, une explication plus naturelle ? Si le cours de nos fonds publics ne répond pas à celui de plusieurs autres pays, c’est qu’en France les capitaux sont plus chers qu’ailleurs, c’est que notre crédit général n’est pas au même niveau. En effet, ce qu’on appelle le crédit public, c’est-à-dire le crédit de l’état, quelque important qu’il nous paraisse, est dominé par le crédit général, dont il n’est, à bien des égards, qu’une dépendance. Le gouvernement français, dit-on, offre bien autant de garanties que tel autre gouvernement plus favorisé que lui. Sans doute : il en offre peut-être davantage ; mais le milieu où il s’agite n’est pas le même, et voilà pourquoi, avec des garanties équivalentes, il n’obtient pas un succès égal. Comment veut-on qu’il emprunte à bon marché dans un pays où les capitaux sont chers ? Il faut bien reconnaître qu’un gouvernement, lorsqu’il emprunte, n’est après tout qu’un riche particulier, soumis comme tous les autres à l’influence du crédit général, et tout ce qu’il peut obtenir en offrant des garanties meilleures, c’est d’emprunter au taux le plus favorable que la situation du pays comporte. Veut-on que le cours des fonds publics s’élève ? que l’on travaille à étendre le crédit général, et pour cela une seule chose est à faire : c’est de favoriser, disons mieux, c’est de permettre en France le développement des institutions de crédit, que l’on s’obstine à étouffer.

Renonçons donc à invoquer, à propos de la conversion des rentes, ces considérations générales qui n’ont aucune valeur. N’attribuons pas à un fait dont l’action est circonscrite, une influence qu’il ne doit point avoir. La conversion n’est autre chose qu’une mesure d’économie et d’ordre : c’est à cet unique point de vue qu’il faut l’envisager. Que si elle peut réagir sur le cours de nos fonds, c’est seulement en contribuant à améliorer notre situation financière, et par conséquent le crédit particulier de l’état.

Mais il faut convenir aussi que sa portée véritable a été beaucoup amoindrie. Selon quelques hommes, il s’agirait seulement de réaliser, une fois pour toutes, une faible économie de quelques millions sur