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ne fut pourtant, à leur égard, ni moins incisif, ni moins personnel qu’ils ne l’avaient été envers lui ; il déclara que si Fox et ses amis devaient, comme ils s’en vantaient hautement, être appelés dans les conseils de la future régence, c’était, dans son opinion, un motif de plus d’adopter de sages précautions qui leur ôtassent les moyens de préparer des entraves à l’exercice de l’autorité royale pour l’époque si vivement désirée où elle pourrait reprendre son action. Les résolutions proposées furent votées à de fortes majorités. Communiquées dès le lendemain à la chambre des lords, elles y donnèrent lieu à des débats semblables, qui aboutirent au même résultat. En dehors du parlement, l’opinion se prononçait en faveur de la politique de Pitt. De nombreuses adresses vinrent attester aux chambres l’approbation dont elle était l’objet ; deux ou trois seulement de celles qui leur parvinrent étaient conçues dans le sens de l’opposition.

Pitt, ayant enfin achevé de préparer le terrain et de mûrir son plan d’organisation de la régence, écrivit au prince de Galles pour lui en faire connaître les bases. L’autorité royale ne devait être remise.entre les mains du régent qu’avec la restriction de ne conférer aucune pairie ni aucun emploi à vie ou en survivance, à l’exception de ceux qui sont tels par leur nature ; aucun pouvoir ne lui était attribué sur la propriété personnelle du roi ; la garde de la personne du roi était confiée à la reine ; toute la maison royale était placée sous son autorité, avec la faculté d’en nommer et d’en révoquer les officiers ; un conseil. lui serait désigné par tes deux chambres pour qu’elle le consultât lorsqu’elle le jugerait à propos ; ce conseil devrait s’assurer chaque jour de l’état de la santé du roi, et on pourrait lui confier aussi l’administration des biens du monarque, sans lui donner pourtant le droit de les aliéner. Dans le cas où la maladie du roi viendrait à se prolonger, ces dispositions pourraient être modifiées.

Le prince de Galles, dans sa réponse à la communication du ministre, protesta avec amertume contre un projet dicté, suivant lui, par une défiance injurieuse, et qui semblait combiné pour jeter la division dans la famille royale, contre un projet qui affaiblissait outre mesure le pouvoir souverain et compromettait même le principe monarchique ; il déclara pourtant qu’uniquement dévoué au bien de son pays, il accepterait les conditions qu’on lui offrait, si, contre son espérance, elles obtenaient la sanction du parlement. Pitt répliqua à ce singulier consentement par l’expression froidement respectueuse du regret qu’il éprouvait de voir ses intentions ainsi méconnues :

Le jour même où il allait enfin saisir la chambre des communes des