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L’Autriche s’engagea à soutenir la défensive sur le Rhin, et à prendre l’offensive du côté des Alpes. Par son influence, les pensées pacifiques qui s’étaient produites hautement dans la diète, et que la Prusse encourageait, furent paralysées.

Aux difficultés, aux dangers de la situation extérieure, se joignaient pour le gouvernement britannique des complications intérieures d’une extrême gravité. A la suite des découvertes faites l’été précédent sur les complots des sociétés révolutionnaires, des poursuites criminelles avaient été commencées dans plusieurs parties du royaume. Presque partout elles aboutirent à des résultats qui n’étaient rien moins que propres à augmenter la force morale du pouvoir. A Édimbourg, un homme fut condamné à mort et exécuté pour avoir tenté de s’emparer du château à l’aide d’un mouvement séditieux et d’opérer ainsi une révolution ; mais il se trouva que cet homme était un espion de la police, dont il trompait la confiance, et il essaya de se sauver en affirmant que dans cette affaire il avait joué le rôle d’un agent provocateur cherchant à découvrir les malintentionnés. A Lancastre, dix individus avaient été traduits devant les assises comme accusés d’avoir formé un projet d’insurrection à main armée pour seconder les Français dans le cas où ils viendraient à débarquer ; il fut constaté que cette accusation n’était qu’une pure calomnie suggérée à un faux témoin par les ennemis personnels des accusés. A Londres enfin, les membres des sociétés révolutionnaires dont l’arrestation avait donné lieu dans le parlement à des débats si violens, à des résolutions si importantes, le cordonnier Hardy, le pamphlétaire Horne Tooke, et dix autres mis en jugement avec eux comme prévenus de haute trahison, furent aussi acquittés. Leur culpabilité n’était pas douteuse, mais ce n’était qu’au moyen de subtilités et d’inductions forcées que l’accusation avait pu essayer de faire rentrer les faits qu’elle dénonçait dans la définition légale de la haute trahison. Erskine, un de leurs défenseurs, profita de cette circonstance avec une admirable habileté pour arracher au jury un acquittement qui eût été presque impossible, si, comme quelques-uns des ministres l’avaient proposé, on les eût simplement poursuivis pour félonie. Pendant la durée de ce procès, une anxiété extrême avait régné dans tous les esprits. La populace, qui se pressait chaque jour à la porte du tribunal, couvrait les défenseurs de ses applaudissemens et prodiguait au contraire les injures et les menaces au procureur-général, qui put même quelquefois craindre pour sa vie. Hardy, après sa mise en liberté, fut porté en triomphe. L’issue de cette affaire fut