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et de la Hollande, avait eu la pensée de les réunir aux siennes dans le détroit de la Manche pour enlever aux Anglais l’empire de la mer, et obtenir ainsi la facilité d’opérer des débarquemens, soit en Irlande, soit même dans la Grande-Bretagne. Le gouvernement britannique, comprenant la gravité du danger, mit tous ses soins à empêcher la jonction des escadres ennemies, et les dispositions qu’il prit eurent le succès le plus complet. Dès le mois de février, l’amiral Jervis battit près du cap Saint-Vincent, en Andalousie, la flotte espagnole, un peu supérieure à la sienne, lui prit quatre vaisseaux de ligne, et la força à rentrer dans le port de Cadix. Quelques mois après, l’amiral Duncan, à la tête de cette escadre de la mer du Nord, qui, par sa révolte, avait mis l’état dans un si grand danger, défit, non loin du cap Camperduyn, la flotte hollandaise du Texel, et lui enleva huit vaisseaux. Ces deux victoires, qui maintenaient la suprématie maritime de l’Angleterre et la mettaient pour le moment à l’abri d’une invasion, excitèrent dans la nation tout entière des transports d’enthousiasme. La pairie et de magnifiques pensions votées par les deux chambres récompensèrent les amiraux victorieux. Ce ne furent pas les seuls succès de l’Angleterre dans le cours de cette campagne. Deux frégates françaises, envoyées sur les côtes du pays de Galles pour y essayer un débarquement, furent aussi capturées. Dans les Indes occidentales, l’île espagnole de la Trinité fut conquise. Des expéditions envoyées contre Puerto-Rico et Santa-Cruz de Ténériffe furent moins heureuses.

Tandis que le gouvernement britannique affermissait sa supériorité sur l’océan, il perdait le dernier allié qui lui restait sur le continent, le seul moyen d’action et d’influence qu’il y possédât encore. L’Autriche, tant de fois vaincue en Italie par l’ascendant de Bonaparte, avait tenté de changer la fortune en lui opposant un adversaire plus digne de lui que tous ceux qu’il avait jusqu’alors combattus, le jeune archiduc Charles, le glorieux libérateur de l’Allemagne. L’archiduc avait succombé comme ses prédécesseurs. Poursuivi à travers les Alpes, jusqu’au centre des provinces allemandes de l’Autriche, pendant que Hoche et Moreau passaient victorieusement le Rhin, poussant devant eux d’autres généraux autrichiens, il avait dû conseiller à la cour de Vienne d’accepter enfin la paix que les vainqueurs se montraient toujours empressés de lui offrir. Le 18 avril, le traité préliminaire de Léoben mit fin aux hostilités, et les bases d’une pacification ayant été ainsi posées, on ouvrit les négociations qui devaient aboutir, six mois après, au traité de Campo-Formio.