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d’une société condamnée par la loi et à la reprise de manifestations dangereuses pour la paix publique, il avait manqué à ses devoirs de magistrat, et qu’il lui retirait sa commission. » À cette nouvelle, l’esprit orangiste se souleva, et le nord de l’Irlande fut sur pied. A Enniskillen, sous la présidence de lord Loftus, fils aîné de lord Ely, et gendre du duc de Marlborough ; à Lisburn, sous la présidence du marquis de Downshire ; à Belfast, sous la présidence de lord Roden, il y eut de grands meetings protestans en l’honneur de M. Watson, où cent cinquante à cent soixante loges orangistes se montrèrent, musique en tête, munies de leurs insignes, pleines d’ardeur et de zèle. Puis, comme on devait s’y attendre, le mouvement s’étendit et gagna plusieurs comtés. Aujourd’hui, de nouvelles réunions sont annoncées, qui sans doute iront plus loin que les précédentes.

Ainsi, aux deux pôles de l’Irlande, voilà, au mépris de la loi et du ministère, deux associations également ardentes, également menaçantes, également hostiles au gouvernement anglais, l’une plus nombreuse, l’autre plus riche et mieux disciplinée. Et qu’on le remarque bien, avec des buts tout opposés, ce sont, des deux parts, les mêmes procédés et presque le même langage. A Dublin, on prend l’avis des avocats les plus habiles, afin « de conduire, selon l’expression d’O’Connell, une voiture à quatre chevaux à travers la loi ; ».à Belfast, on déclare qu’on réorganisera la grande association orangiste, tout en évitant de tomber sous le coup des lois existantes. A Conciliation-Hall, on met à l’index des prochaines élections tout membre, quelque libéral qu’il soit, qui ne se prononcerait pas nettement en faveur du rappel ; dans la loge centrale de Lisburn, on fait vœu de ne pas réélire un seul membre qui ne soit pas orangiste. Tandis qu’à Galway Tom Steele offre de mourir pour la cause catholique, lord Loftus à Enniskillen dit qu’il est prêt à verser la dernière goutte de son sang pour la cause protestante. Je ne sache pas d’ailleurs qu’O’Connell ou Tom Steele aient été jamais plus loin que le dean de Dronmore, s’écriant à Lisburn : Les ministres nous ont trompés Ils nous ont trompés, les coquins, mais ils ne nous tromperont plus ; ou que M. Richardson, déclarant qu’excepté Judas, il n’y a dans l’histoire aucun exemple d’un traître pire que sir Robert Peel ; ou que M. Hudson, annonçant au monde que le lion orangiste s’est levé dans sa force, que ses rugissemens se font entendre, que sa crinière se dresse, et que le rappel, le papisme et le peeléisme sont déjà prosternés devant lui ; ou que le révérend Knox, commençant par dire que Watson devrait être canonisé, et finissant par un