qu’il aura beaucoup à faire pour se la concilier. Un autre député craint, avec plus de raison, que le gouvernement n’ait sur la chambre des pairs un trop grand ascendant, et il a, dit-il, « peu d’espoir en la fermeté de ces illustrations de diverses espèces dont on prétend composer la nouvelle pairie » M. Royer-Collard traite assez dédaigneusement les catégories d’illusoires. La chambre des pairs et son rapporteur, M. Decazes, comprirent beaucoup mieux le danger des catégories, quand ils virent que l’effet des catégories serait de faire de la chambre des pairs la retraite presque nécessaire de tous les fonctionnaires de l’état, et d’appeler la pairie à représenter les emplois publics.
Nous avons vu ce que M. Guizot attendait de la pairie : il en attendait la création d’une classe d’hommes politiques, d’une aristocratie constitutionnelle. Selon M. Royer-Collard, la chambre des pairs doit représenter l’inégalité, c’est-à-dire les supériorités, non pour leur intérêt, mais pour la protection de la société entière. Est-ce des catégories que nous pouvons espérer voir sortir cette aristocratie constitutionnelle souhaitée par M. Guizot, ces supériorités indiquées par M. Royer-Collard ?
Il y a entre les intentions de la discussion de 1831 et les effets des catégories une bizarre contradiction. Dans la discussion, il est toujours question de grandes illustrations, « d’hommes dont la patrie se soit honorée dans tous les temps, et qui joignent à de grands services une haute probité politique (1). » Le programme est beau ; cependant, quand on arrive aux faits, c’est-à-dire aux catégories, que trouvons-nous ? Des règles sur la durée des services, trois ans comme ambassadeur, dix ans comme conseiller d’état, dix ans comme procureur-général, etc. Ces services, assurément, comportent fort bien l’illustration, mais ils ne l’exigent pas. L’éclat et la gloire peuvent s’y joindre, ils n’en font pas nécessairement partie. On peut être ambassadeur, on peut être lieutenant-général, on peut encore être procureur-général pendant dix ans sans être illustre. Ne nous laissons donc pas tromper par l’ambiguité des mots. La discussion semble demander de grands services aux candidats de la pairie, une victoire gagnée, un grand dévouement accompli, une belle invention dans l’industrie, une grande œuvre dans les arts, un grand talent, et tout cela joint à la probité et à la capacité politiques ; mais les catégories expliquent ce mot de services : il ne s’agit plus que d’un temps de services plus ou moins long dans les fonctions publiques.