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un jour se liguer pour combattre l’Autriche et conquérir l’indépendance ? c’est là un autre rêve. La chute du gouvernement pontifical pourrait-elle modifier la politique italienne ? ce n’est qu’une illusion de plus ; ce gouvernement sera toujours la gloire de l’Italie, et peut-être est-il réservé à un pape de régénérer le pays. Ainsi l’espoir des républiques, l’espoir du royaume d’Italie, l’espoir d’une domination nationale, l’espoir d’une ligue nationale, tout est rejeté par M. Balbo. Les patriotes parlent-ils de s’insurger ? suivant lui, une insurrection nationale de vingt-trois millions d’hommes est une absurdité. Enfin pensez-vous qu’une conflagration européenne offrira à l’Italie l’occasion de s’insurger ? nouvelle erreur, la paix du monde est assurée à jamais. Quelle est donc l’espérance qui reste à l’Italie ? Une seule, celle d’une guerre contre les infidèles : le jour où l’empire turc tombera, l’Autriche prendra possession d’une partie de la Turquie, et, avec la permission des diplomates, l’Italie restera naturellement indépendante. Sans entrer dans les détails du partage, il nous suffira d’énoncer la conclusion de M. Balbo ; elle se réduit à livrer la Lombardie à la maison de Savoie, et à augmenter de quelques fractions de territoire les deux duchés de Parme et de Modène. Voyant les réformistes mettre bas les armes pour encourager les exercices gymnastiques dans la vague attente d’une insurrection lointaine, M. Balbo comprend que ces tendances inoffensives ne sauraient effrayer les gouvernemens ; il supprime jusqu’à l’ombre d’un projet d’insurrection, et prétend concilier à l’amiable tous les différends entre les libéraux, les princes et l’Autriche. Il veut bien qu’on se prépare à la guerre par des exercices gymnastiques, mais il veut aussi que les athlètes formés dans ces palestres entrent dans les armées des princes italiens ; il songe sans doute à augmenter les forces militaires des états de la péninsule, dans la prévision d’une époque d’indépendance, mais cette éducation guerrière doit se faire en secondant l’Autriche dans la conquête de la Turquie. Les conseils les plus paternels de patience et de résignation sont prodigués aux Lombards et aux Vénitiens ; M. Balbo les encourage à servir sous le drapeau impérial, et toujours pour aider leur maître à s’emparer de la Turquie. En d’autres parties de son livre, M. Balbo conseille l’état militaire comme très salubre ; il ne se montre pas moins porté pour la marine, qu’il trouve sanitairement excellente. Quant aux constitutions, l’écrivain piémontais ne veut pas qu’on les impose aux princes ; ce serait les irriter, entraver la conquête de la Turquie. C’est aux princes de concéder librement des garanties, et certes les princes italiens s’empresseront de les accorder quand personne ne les demandera, surtout après le partage de l’empire