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relever la confiance de la nation, que des évènemens récens ont pu ébranler, c’est bien assez qu’un ministre des finances soit en mesure d’affirmer déjà qu’à la fin des deux trimestres de 1845 les intérêts de la dette publique seront très exactement payés. Si, après cette année malheureuse de 1844, qui a commencé parmi les crises ministérielles, parmi les pronunciamientos d’Alicante et de Carthagène, pour s’achever au milieu des discussions irritantes du parlement, des soulèvemens de la Rioja et du Haut-Aragon, le ministre des finances est en état de prendre un pareil engagement, n’est-il pas évident qu’il pourra tenir un langage plus rassurant encore à la fin de l’année où nous entrons ? En Espagne comme en dehors de la Péninsule, cela n’est pour personne l’objet d’aucun doute, si le gouvernement de Madrid, qui, par la grace qu’il vient d’accorder au colonel Rengifo et à ses deux compagnons d’infortune, a hautement inauguré une politique nouvelle, une politique de conciliation et d’humanité, s’occupe enfin de régénérer la Péninsule par les réformes administratives et par les améliorations d’intérêt positif.

Aux cortès comme dans la presse, le système par lequel M. Mon s’efforce de réhabiliter le crédit public n’a point rencontré de sérieux adversaires, quelles que soient les inquiétudes que certains capitalistes et certains partis ont cherché d’abord à propager dans le royaume. On n’en peut dire autant, par malheur, du projet de loi sur la constitution civile du clergé, qui maintenant même soulève au congrès une très vive opposition. Il ne faut pas se faire illusion : ce problème, qui consiste à subvenir aux besoins du clergé espagnol, à soulager sa profonde misère, sans contrarier les idées en vertu desquelles subsiste la royauté d’Isabelle II, est le plus brûlant, le plus difficile qui, à l’heure actuelle, s’agite chez nos voisins. Il y a quelques jours à peine, la majorité du congrès a émis le vœu manifeste que le gouvernement répare envers le clergé la trop longue injustice des régimes qui ont précédé le cabinet Narvaez. La question du clergé en Espagne est plus qu’une question monarchique : c’est une vraie question sociale ; on peut être convaincu que dans ce pays les troubles ne prendront fin que si elle est convenablement résolue. Dans le projet de M. Mon, la dotation qu’on se propose de voter en faveur du clergé s’élèverait à plus de 16 millions de francs ; mais, outre qu’avec une telle somme il est impossible de subvenir à tous les besoins du clergé, M. Mon n’est point en état de faire une réponse satisfaisante quand on lui demande de quelle manière ces 16 millions pourront être payés. M. Mon, il est vrai, a conclu avec la banque de Saint-Ferdinand un arrangement qui, pendant un an, paraît garantir la dotation ; mais comment fonder sur ce contrat de sérieuses espérances, quand on songe que le gouvernement n’a donné à la banque que des gages presque chimériques et, à coup sûr, insuffisans ? Pour en finir tout d’un coup avec une telle situation, MM. de Viluma, de Veraguas, d’Abrantès et quelques autres députés ont présenté des amendemens qui peuvent différer sur des points secondaires, mais dont le but est iden-