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qui ont terminé leur existence chez elles, dans une aisance plus ou moins grande, 8,326 qui ont fini leurs jours dans les hôpitaux, 64 qui sont mortes dans les prisons, 289 qui ont eu pour dernier lit les dalles glacées de la Morgue. Ces résultats, que chaque année reproduit avec d’imperceptibles différences dans les chiffres, sont profondément tristes. Ils démontrent que dans cette cité si fière de sa civilisation et de son opulence, plus du tiers des citoyens périraient sans secours et peut-être sans asile, si la charité publique ne les recueillait à leurs derniers momens. Même parmi ceux qui rendent le dernier soupir dans un lit qui leur appartient, un tiers seulement a vécu dans l’aisance. C’est une conjecture qu’on peut tirer du tableau des inhumations faites l’année dernière, dans les trois cimetières de Paris. Sur 22,661 enterremens, déduction faite de ceux qui ont été opérés à la charge des hospices et hôpitaux, il y a eu 1566 achats de terrain a perpétuité, et 4,763 locations temporaires. La fosse commune, triste rendez-vous des pauvres, a englouti 16,332 cadavres.

Même dans les phénomènes qui sortent de l’ordre naturel, la persistance des résultats, le retour périodique des mêmes chiffres étonne le statisticien. Quand une année commence, on peut prédire qu’un peu plus de neuf cents Parisiens périront de mort violente, accidentelle ou volontaire Deux cents à deux cent vingt individus seront asphyxiés par submersion, une cinquantaine par strangulation La mode seule conserve quelque empire jusque sur le suicide ainsi en 1832, le plus grand nombre des malheureux qui se sont donné la mort se sont précipités dans la Seine ; en 1834 et 1835, après quelques catastrophes qui avaient frappé l’imagination populaire, on préféra l’asphyxie par le charbon. Les hommes figurent pour les trois quarts dans le tableau des morts soudaines, il y pourtant une catégorie de victimes, celles qui périssent par la brûlure, qui appartiennent presque toutes au sexe féminin.

Représentons-nous maintenant le mouvement de cette ruche immense ou bourdonnent, à côté des laborieuses abeilles, tant de guêpes malfaisantes et stériles. Essayons de classer les habitans de Paris par rapport à la profession qu’ils exercent. Les Recherches statistiques, publiées récemment par ordre de M. le préfet de la Seine, distribuent la population parisienne en cinq catégories, en comprenant dans chaque groupe toutes les personnes qui vivent de la profession exercée par le chef de la famille. Par exemple, pour un banquier réunissant chez lui sa femme et trois enfans, on compterait cinq personnes dans la classe