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que le cas du Louis est le premier de ce genre, et parce que le capteur a agi de bonne foi ; mais il annonce en même temps que, si un cas pareil se présentait de nouveau, des dommages-intérêts seraient prononcés contre le capteur.

Le 6 juillet 1824, sir William Scott rendit un second arrêt, fondé exactement sur les mêmes principes. Il s’agissait d’un navire espagnol, le San Juan Nepomuceno, abordé, visité et capturé le 7 décembre 1817 par le croiseur anglais le Prince régent, antérieurement à la ratification du traité conclu entre la Grande-Bretagne et l’Espagne pour la suppression de la traite des nègres. Le San Juan Nepomuceno fut encore défendu par le docteur Lushington, qui reproduisit en cette circonstance les principes qu’il avait déjà développés dans l’affaire du Louis.

Les tribunaux mixtes[1], institués pour juger les navires saisis en conséquence des traités spéciaux obtenus par l’Angleterre, ont, pendant beaucoup d’années, et je puis dire jusqu’à la fin de 1838, appliqué la doctrine consacrée à la fois par la jurisprudence de la haute cour de l’amirauté britannique, et par les déclarations des hommes d’état anglais. Cette remarque s’applique à l’affaire du navire Dona Maria da Gloria, jugée en 1834, et à celle des navires américains Mary-Anne Cassard, Florida, Eagle, Hazard, Iago, déférés en 1838 au tribunal mixte de Sierra-Leone.

Le jugement prononcé le 30 octobre 1838 à l’occasion du navire la Mary-Anne Cassard mérite d’être mentionné spécialement. Ce navire avait été arrêté sous pavillon des États-Unis ; quoique ses papiers fussent en apparence américains, il était évident que la Mary-Anne Cassard était une propriété espagnole déguisée sous le caractère américain. Néanmoins le tribunal mixte anglo-espagnol de Sierra-Leone se

  1. Les juridictions dont je veux parler ici sont instituées en vertu des traités conclus par l’Angleterre avec l’Espagne, le Portugal et le Brésil. Par exemple, en vertu du traité conclu avec l’Espagne, deux tribunaux mixtes ont été établis, l’un à Sierra-Leone, l’autre à la Havane. Ils sont composés d’un juge anglais et d’un juge espagnol ; indépendamment de ces deux juges, il y a un arbitre anglais et un arbitre espagnol. Quand les deux juges sont du même avis, le jugement est rendu sans le concours des arbitres ; dans le cas où les deux juges ne sont pas du même avis, le sort décide si la question sera tranchée par l’arbitre anglais ou par l’arbitre espagnol. — Les tribunaux mixtes anglo-portugais sont au nombre de trois depuis le traité de 1842. Ils siègent, l’un à Sierra-Leone, l’autre à Boavista, dans une des îles du cap Vert, le troisième au cap de Bonne-Espérance. C’est à Sierra-Leone et à Rio-Janeiro que sont établis les tribunaux mixtes anglo-brésiliens. D’ailleurs, les uns et les autres sont organisés et fonctionnent de la même manière.