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durassent, il fallait que la souscription durât aussi. Le fondateur de cette mission de Saint-Yves, un calviniste qui semble avoir été quelque riche marchand de Londres et qui se nommait Story, retarda l’envoi des fonds destinés à l’entretien de l’éloquence calviniste, et reçut aussitôt du juge de paix, ancien membre du parlement, aujourd’hui caché dans Saint-Yves et y faisant tristement son salut, la lettre suivante que nous traduisons avec une extrême servilité :


A mon très cher bon ami, M. Storie, à l’enseigne du Chien, Bourse de Londres, remettez les présentes.

« Saint-Ives, 11 janvier 1635.

« MONSIEUR STORIE,

« Dans la liste des bonnes œuvres que vos concitoyens nos compatriotes ont faites, celle-ci ne sera pas comptée pour la moindre, qu’ils ont pourvu à la nourriture des ames. L’érection d’hôpitaux pourvoit aux corps des hommes : bâtir des temples matériels est considéré comme une œuvre de piété ; mais ceux qui procurent la nourriture spirituelle, ceux qui bâtissent des temples spirituels, ceux-là sont les hommes véritablement pieux. Un ouvrage semblable a été votre fondation d’une chaire de prêche dans laquelle vous avez placé le docteur Wells, homme de bonté, de zèle et de capacité, pour faire le bien de toutes les manières ; inférieur à nul que je connaisse en Angleterre. Et je suis persuadé que, depuis sa venue, le Seigneur a fait par lui beaucoup de bien parmi nous.

« Il reste seulement désirable à présent que Celui-là qui vous a mu à faire ceci vous pousse à la continuation de l’œuvre, et, par conséquent, qu’il l’achève. Élevez vers Lui vos cœurs. Et sûrement, monsieur Storie, ce serait une chose lamentable de voir un prêche succomber dans les mains de tant d’hommes capables et pieux, comme je suis persuadé que sont les fondateurs de celui-ci ; aujourd’hui nous voyons qu’ils sont supprimés avec hâte et violence par les ennemis de la Vérité de Dieu. Loin de nous soit que tant de péché s’attache à vos mains. Vous qui vivez dans une cité renommée par la lumière brillant de l’Évangile, vous savez, monsieur Storie, que supprimer le paiement, c’est faire tomber le prêche, car qui va guerroyer à ses dépens ? Je vous supplie donc, par les entrailles de Jésus-Christ, mettez la chose en bon train, et faites donner la paie au digne homme. Les ames des enfans de Dieu vous béniront pour cela, et ainsi ferai-je ; et je demeure toujours.

« Votre affectueux ami dans le Seigneur,

« OLIVIER CROMWELL. »

« Assurez mon amitié cordiale à M. Busse et mes autres bons amis (puritains).