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ne concourt pas à augmenter la prépondérance de la nation, — un parlement qui s’amuse à bâtir des constitutions sur le papier, qui brûle un ou deux hérétiques, chose assez inutile en soi, et qui ne donne pas d’argent, chose nécessaire ? Non. C’est ce qu’il leur dit d’une façon fort verte, assez brutale et très peu oratoire :

« Je ne me suis point appelé à cette place. Je le répète, je ne me suis point appelé à cette place ! De cela Dieu m’est témoin, et j’ai beaucoup de témoins qui, je le crois, offriraient leur vie et porteraient témoignage de cela. Non, je ne me suis point appelé à cette place ! et, lorsque j’y suis, ce n’est pas moi seul qui porte témoignage pour moi-même ou pour mon office ; c’est Dieu et le peuple de ces nations qui ont aussi porté témoignage pour mon office et pour moi. Si Dieu m’y a appelé et si le peuple porte témoignage pour moi, — Dieu et le peuple me l’ôteront, autrement je ne le quitterai pas ! Je serais infidèle au dépôt que Dieu m’a confié et à l’intérêt du peuple si je le quittais.

« Que je ne me suis point appelé moi-même à cette place, voilà ma première assertion.

« Que je ne me porte pas témoignage pour moi-même, mais que j’ai beaucoup de témoins, voilà ma seconde. Je vais, prendre la liberté de vous parler plus au long de ces deux choses. — Pour rendre mes assertions plus claires et plus intelligibles, permettez-moi de remonter un peu en arrière.

« J’étais gentilhomme de naissance, ne vivant ni dans une grande splendeur ni dans l’obscurité. J’ai été appelé à plusieurs emplois dans la nation, pour servir dans le parlement et dans d’autres emplois, et, — afin d’entrer dans d’autres détails, — je me suis efforcé de remplir, dans ces services, le devoir d’un honnête homme envers Dieu, dans l’intérêt de son peuple et envers la chose publique (commonwealth) ; j’ai eu à cette époque une approbation suffisante dans les cœurs des hommes, et j’en ai reçu quelques preuves. Je ne veux pas raconter toutes les époques, les circonstances et les occasions qui, par la volonté de Dieu, m’ont appelé à l’y servir, ni la présence et les bénédictions de Dieu qui en ont porté témoignage.

« Ayant eu quelques occasions de voir, avec mes frères et compatriotes, une heureuse fin mise à vos guerres violentes et à nos débats opiniâtres contre l’ennemi commun, j’espérais, dans la vie privée, recueillir avec mes frères les fruits et les compensations de nos fatigues et de nos dangers, à savoir, jouir de la paix et de la liberté, et des privilèges d’un chrétien et d’un homme à peu près sur le pied d’égalité avec les autres, selon ce qu’il plairait à Dieu de me dispenser. Quand, dis-je, Dieu mit fin à nos guerres, ou du moins les amena à une issue qui faisait espérer d’en voir bientôt la fin, — après le combat de Worcester, — je vins à Londres pour rendre mes hommages et mes devoirs au parlement alors assemblé, espérant que tous les esprits seraient disposés à faire ce qui semblait la volonté de Dieu, à savoir, donner la paix et le repos à son peuple, et particulièrement à ceux qui avaient répandu le plus de leur sang dans l’exécution des affaires militaires.