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LE SALON


DE 1846.




LA SCULPTURE.


M. Pradier a voulu témoigner au public sa reconnaissance et le remercier des applaudissemens accordés l’année dernière à sa Phryné. Il ne néglige rien pour soutenir, pour agrandir la popularité de son nom. Il redouble d’efforts et multiplie ses ouvrages avec une activité qu’il ne sait peut-être pas contenir dans de justes limites. Au lieu de méditer long-temps sur chacune de ses compositions, avant de prendre le ciseau, il semble qu’il improvise : la statue du duc d’Orléans, la statue de Jouffroy, la Poésie légère, révèlent chez l’auteur une habileté singulière ; mais il est facile de comprendre que M. Pradier ne travaille pas assez lentement, et compte trop sur le charme de l’exécution. Personne plus que nous ne rend justice à son talent ; personne n’admire plus sincèrement l’habileté avec laquelle il sait fouiller le marbre et en tirer l’étoffe et la chair. Le marbre lui obéit, et livre à sa main tout ce qu’elle lui demande. Jamais il ne trahit sa pensée en la traduisant à demi. Si les trois ouvrages que nous venons de nommer ne satisfont pas à toutes les conditions de la statuaire, c’est que M. Pradier n’a pas réfléchi assez long-temps avant de prendre un parti. La statue du duc d’Orléans manque de grandeur et de sévérité. La manière dont la figure est posée a quelque chose de théâtral et en même temps de mesquin. C’est une idée malheureuse d’avoir relevé la cuisse droite. De cette façon, en effet, étant donnée la hauteur du piédestal, le corps paraît trop court. Et lors même que cet inconvénient n’existerait pas, ce mouvement