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ils sont bien plus apparens dans une autre pièce rapportée sous le titre : Versus de Die judicii, que M. Bottée de Toulmon nous a fait connaître, et que l’on voit à la Bibliothèque royale, dans un manuscrit provenant de Saint-Martial de Limoges, sous le numéro 1154, ancien fonds Celle-ci est composée, comme le Dies irae, de vers dits rhythmiques, de huit pieds. Les strophes sont de six vers. Ce manuscrit est du XIe siècle. Il est visible que nous nous rapprochons de la forme de la prose des morts :

Lorsque l’éternelle flamme
Dévorera l’orbe terrestre,
Lorsque le feu terrifie redoublera de fureur,
Lorsque le ciel se ploiera comme un livre,
Lorsque les astres tomberont, ce sera le signe
Que la fin des siècles arrive.

Jour terrible, jour de colère,
Jour d’ombre et d’obscurité,
Jour de clairons, jour de trompettes,
Jour de deuil, jour d’épouvante,
Où le poids des ténèbres
Tombera sur les pécheurs.

Quelle frayeur descendra du ciel,
Quand le roi, courroucé s’avancera… etc.

[1]

Observons, avec M. Bottée de Toulmon, que le premier vers ; le vers le plus saillant du Dies irae, ouvre ici la seconde strophe. De plus, ce vers est visiblement indiqué dans la pièce de M. Paulin Blanc : Dies illa tremenda, dies calamitatis. Dans la filiation, nous saisissons le trait de ressemblance. Un pas de plus, car ici les pas se marquent par siècles, et nous touchons au Dies irae ; mais

  1. Cùm ab igne rota mundi
    Tota coeperit ardere,
    Soeva flamma concremare,
    Coelum ut liber plicare,
    Sidera tota cadere,
    Finis seculi venire.
    Dies irae, dies illa,
    Dies nebulae et caliginis,
    Dies tubae et clangoris,
    Dies luctus et tremoris,
    Quando pondus tenebrarum
    Cadet super peccatores.
    Qualis pavor tunc caderit
    Quandò rex iratus venerit, etc.

    Ces deux derniers vers sont presque littéralement reproduits dans le Dies iroe :

    Quantus tremor est futurus
    Quandò judex est venturus !

    Du reste, la mélodie du Dies iroe pourrait s’ajuster parfaitement à la pièce que nous citons, bien entendu, en ayant soin de dédoubler les strophes.