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printemps, en dégageant l’entrée des ports russes et suédois, encore bloqués par les glaces quand le port de Copenhague se trouve déjà libre, permît une jonction qu’il fallait à tout prix prévenir. Vers la fin du mois de février 1801, il vint occuper la place de lord Spencer à l’amirauté, et son premier acte fut d’expédier à la flotte déjà rassemblée à Yarmouth l’ordre de mettre sous voiles et de se diriger vers l’entrée du Sund.


II.

Le 17 janvier, Nelson avait arboré son pavillon de vice-amiral à bord du San-Josef, de 110 canons. Son ambition était de remplacer lord Keith dans la Méditerranée : en attendant, désireux d’échapper au trouble de sa conscience et aux tourmens domestiques qu’il s’était attirés, il s’était rangé avec empressement sous le pavillon du comte de Saint-Vincent, qui commandait alors l’escadre de la Manche ; mais, avant même que la chute du ministère Pitt appelât le comte de Saint-Vincent dans les conseils de la couronne, Nelson fut placé sous les ordres d’un autre amiral, sir Hyde Parker, qui venait d’obtenir le commandement de la mer du Nord. Lord Spencer, qui destinait déjà cette dernière escadre à entrer dans la Baltique, avait facilement compris que, de tous les amiraux anglais, Nelson était le plus capable d’assurer le succès de cette périlleuse entreprise ; néanmoins l’humeur singulière et fantasque de ce grand homme de mer avait laissé dans le conseil une trop fâcheuse impression pour qu’on n’éprouvât pas le besoin de soumettre au contrôle d’un esprit plus éclairé, d’une raison plus docile et plus mûre, cette valeur emportée et ce brillant courage dont on avait appris à redouter les caprices. Le respect qui entoure en Angleterre les anciens services atténua d’ailleurs ce qu’une pareille résolution pouvait avoir d’offensant vis-à-vis d’un homme placé déjà si haut par l’opinion publique, et Nelson, prévenu officieusement des intentions de lord Spencer, parut se prêter de bonne grace à cette combinaison. Le 12 février, il quitta le San-Josef pour le Saint-George, vaisseau de 98 canons, se rendit à Portsmouth, afin d’y presser le départ de 7 vaisseaux de ligne, et, dans les premiers jours de mars, vint mouiller avec cette division en rade de Yarmouth, où l’attendait sir Hyde Parker.

On n’eût point songé à cette époque à placer le pavillon d’un vice-amiral anglais sur un autre vaisseau qu’un vaisseau à trois ponts c’était là une de ces bienséances officielles auxquelles les Anglais ont de tout temps, et non sans raison, attaché une singulière importance. Le soin d’assurer aux officiers-généraux de la flotte des logemens convenables a donc contribué, plus que toute autre chose, à maintenir dans la marine anglaise un très grand nombre de ces lourdes et for-