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Les colonies occidentales d’Albany et de la rivière des Cygnes n’ont jamais joui de l’exubérante prospérité des établissemens méridionaux. Comme le convict-system n’y a pas été appliqué[1], les colons n’ont pas eu la ressource du travail des condamnés. Il est surprenant toutefois qu’Albany, avec son beau port, avec son climat si égal et si doux, avec les terres excellentes qui l’environnent, ne soit pas plus fréquentée. Si les riches Anglais des Indes-Orientales connaissaient ce pays salubre, ils viendraient en grand nombre lui demander la guérison des maladies contractées aux bords de l’Indus ou du Gange. Négligé par la métropole, l’établissement de la rivière des Cygnes a langui durant plusieurs années. Des communications rares et irrégulières le rattachaient à peine à la mère-patrie. Quelquefois, faute d’arrivages, des articles d’une consommation journalière, dont la valeur n’est appréciée que par ceux qui en sont privés, ou manquaient entièrement, ou se vendaient à des prix excessifs. Le savon commun, par exemple, y a valu jusqu’à 5 francs le demi-kilogramme. Les rapports sont devenus un peu plus fréquens soit avec l’Angleterre, soit avec les Indes. L’état général s’est amélioré ; on commence à croire que cet établissement tiendra plus qu’il n’avait promis. Il est très souvent visité par les baleiniers américains. Il n’est pas extraordinaire de voir douze ou quinze navires portant le pavillon des États-Unis à l’ancre au bas de la rivière. Les colons ne prennent aucun intérêt dans la pêche de la baleine, qui pourrait cependant leur offrir une source de profits. Ils préfèrent se consacrer à l’exploitation exclusive de la partie du continent sur laquelle ils ont transplanté leur fortune, et dont la terre est assez riche, en certains cantons, pour avoir donné treize moissons consécutives toujours aussi abondantes, sans avoir été renouvelée par le mélange d’aucun élément étranger. Sur les bords de la rivière des Cygnes, les inondations, quelquefois nuisibles par leur impétuosité, couvrent les plaines d’un limon gras et productif.

En dernière analyse, la colonisation anglaise, dans l’Australie de l’est, du midi et de l’ouest, repose sur la base la plus solide, la plus durable : un sol fécond en ressources, soit agricoles, soit minérales. Dans le nord de l’île, la nature n’a pas doté le territoire du Port-Essington avec la même prodigalité, bien que le bananier, le pin, les arbres fruitiers des tropiques, l’arrow-rout, la canne à sucre, y viennent à peu près sans culture, et que les pommes de terre y aient une saveur très agréable. On ne connaît encore, il est vrai, que la péninsule Cobourg ; peut-être une fertilité ignorée attend-elle plus loin les efforts du pionnier. Sans être insalubre, le climat de ce district ne convient pas aussi

  1. Albany avait été un moment une colonie pénale ; mais on en a retiré les convicts aussitôt qu’elle a été comprise dans le gouvernement des possessions occidentales, après la création de la colonie de la rivière des Cygnes.