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de marchandises[1], c’est le tiers du mouvement de tous nos entrepôts réunis, et, si les réexportations tiennent proportionnellement ici la même place que dans le commerce général, elles doivent y rouler sur une valeur d’au moins 80 millions. Tel serait le point de départ du nouveau régime ; mais, quand il s’agit de développer une branche de commerce, il importe bien moins de mesurer les bases sur lesquelles elle doit s’élever que de les élargir et de les consolider.

L’affectation du port de Frioul au commerce d’entrepôt impliquerait la translation sur un autre point des quarantaines des marchandises et des navires ; elles peuvent d’ailleurs être encore bonnes à conserver pour un petit nombre de cas exceptionnels. La station comprise, au sud-est de l’île de Maire, entre la côte de la Gradule et les îles Plane, de Jarre et de Riou, est très convenablement placée pour ce service. Avant la création de l’établissement actuel du Frioul, on reléguait à l’île de Jarre les navires fortement suspects ; il ne s’agirait ainsi que de la rendre à son ancienne destination. Les trois îles sont susceptibles d’être réunies, comme celles de Pomègue et de Ratonneau, par des digues dont le calcaire jurassique qui les constitue fourrait les matériaux. Indépendamment des intérêts de la Santé, ce travail aurait l’avantage d’établir, à dix milles de Marseille, un mouillage de cinq cents hectares. La dépense en serait bientôt couverte par la valeur des navires qu’il sauverait. De cette position avancée, une escadre couvrirait, en temps de guerre, tout l’atterrage de Marseille ; elle aurait un second point d’appui dans l’extension que reçoit le Frioul, et rien ne manquerait à la défense de la ville et du commerce contre les atteintes de l’ennemi.

Quand la navigation de Marseille, qui a doublé depuis quinze ans, égalera celle de Liverpool, quand il faudra mettre la grandeur de l’établissement naval en harmonie avec l’étendue des débouchés que lui ouvriront du côté de la terre les chemins de fer, le commerce pourra justement réclamer une rade artificielle, comme celle du cap Henlopen, dont le congrès des États-Unis a doté, dès 1828, l’embouchure de la Delaware[2]. Les regards des ingénieurs se tourneront naturellement alors

  1. Les valeurs en entrepôt à Marseille au 31 décembre 1844 s’élevaient à : 56,802,966 francs. Il y en est entré pendant l’année 1845 pour 234,699,187. Total : 291,502,153 francs.
    Il a été retiré pendant l’année 231,655,430. Il restait au 31 décembre : 59,846,723 francs.
    (Administration des douanes.)
  2. Les digues de Henlopen, construites sur le principe de celles de Cherbourg, ont en tout 1,557 mètres de longueur ; elles ont été exécutées de 1829 à 1835, et l’espace mis à couvert est de 120 hectares.