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Espagnols par les Arabes, existait dans l’antique Égypte. Un casque de fer et une cotte de mailles confirment ce que j’ai dit plus haut de l’emploi du fer par les Égyptiens. Des vases portent le nom de l’ancien roi Papi, accompagné de cette devise tracée sur son étendard royal : Qui aime les deux régions. Cette formule est importante, car elle prouve que le roi Papi régnait déjà sur la Haute et la Basse-Égypte, et que les Pharaons de la sixième dynastie, dans laquelle on le place, n’étaient pas souverains seulement d’une portion du pays.

J’arrive aux deux objets les plus remarquables de la collection du docteur Abbot, la bague de Chéops et le collier de Menès. La bague de Chéops est un anneau d’or. L’inscription qui précède le nom de ce roi semble vouloir dire : Divine offrande à la terre d’Anubis dans la région de… offerte au prêtre du trône du roi Choufou (Chéops}. Si le sens est exact, il semblerait indiquer que la bague est contemporaine de Chéops et appartenait à un prêtre attaché à sa personne ; mais on ne saurait dissimuler que ce sens laisse quelque incertitude, et que l’inscription présente des singularités qui peuvent tenir, il est vrai, à l’époque reculée du monument.

L’autre merveille de la collection du docteur Abbot est un collier qui porte le nom du roi Menès. Il en est de même pour le collier que pour les planches de Clot-Bey. Si l’on était certain qu’il remonte au siècle du roi dont il porte le nom, on aurait devant les yeux le plus ancien débris du passé. Ici, le nom de Menès n’étant accompagné d’aucun autre hiéroglyphe, on ne saurait établir directement que le collier, ainsi que les pendans d’oreilles qui l’accompagnent, ne remontent pas à cette monstrueuse antiquité ; mais rien non plus ne prouve qu’ils aient droit à cet honneur. On peut très bien avoir tracé le nom de Menés sur un collier fabriqué long-temps après lui. Peut-être avons-nous là le collier d’un prêtre consacré au culte du roi-dieu Menès ou de la femme d’un tel prêtre. Quoi qu’il en soit de cette supposition ou de toute autre, on n’est pas obligé d’admettre qu’à l’origine de l’histoire égyptienne, on fût arrivé au degré d’art et de luxe que supposent ces ornemens. Il y a plus : j’ai vu dans la collection de Clot-Bey une lamelle d’or qui a fait évidemment partie de la toilette de femme ou de prêtre dont le docteur Abbot possède dans son beau collier la portion principale. Sur cette lamelle d’or est tracé, comme sur le collier, le nom de Menès ; mais, chose singulière, il est accompagné ici du nom d’Amasis. Si l’on suppose qu’il s’agit du premier Amasis, chef de la dix-huitième dynastie, le résultat sera toujours de faire descendre le collier de Menès de 4,500 à moins de 2,000 ans avant Jésus-Christ, c’est-à-dire d’environ 3,000 ans. Toutefois la date de ces bijoux pourrait être singulièrement rapprochée, si on la rapportait au second Amasis, celui qui usurpa le trône d’Égypte sur Apriès, peu de temps avant l’invasion des Perses. Dans