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ce désir, et qu’il fallait faciliter l’emploi des billets de banque dans les transactions journalières en descendant au-dessous de 500 francs. Sur ce point, la commission a même été au-delà de la proposition du gouvernement ; et elle a cru qu’un billet de 200 francs devait être préféré à celui de 250 francs. Suivant elle, le billet de 200 francs se prêtera mieux aux besoins des grandes caisses publiques et privées. A ses yeux, cette coupure a encore l’avantage de mieux rentrer dans les formes décimales et dans les analogies avec notre monnaie. La coupure à 200 francs est une transition nécessaire aux idées plus absolues qui demandent le billet de 100 francs, et si, plus tard, on doit en venir à ce dernier billet, l’analogie avec nos monnaies d’argent de 1 fr., 2 fr., 5 fr., sera complète. La chambre a dans son sein des économistes qui sont frappés des bons résultats qu’aurait pour le commerce le billet de 100 francs ; il développerait la circulation par les facilités qu’il apporterait aux transactions de toute nature. A leur avis, cette expérience est sans danger, et ils désireraient qu’elle commençât dès à présent. C’est pour réaliser ce vœu que M. Léon Faucher a présenté un amendement ainsi conçu : « La moindre coupure des billets de la Banque de France, fixée à cinq cents francs par l’art. 14 de la loi du 24 germinal an XI, est abaissée à cent francs. La même disposition est étendue aux autres banques publiques autorisées. » Le ministre des finances, la Banque et la commission combattent cette création des billets de 100 francs ; ils y voient le danger possible d’une circulation exagérée. Le rapporteur expose aussi qu’il serait permis de craindre que, lorsque le billet de 100 francs descendrait dans une classe moins riche, moins éclairée que celle qui use aujourd’hui des billets de banque, la moindre inquiétude ne multipliât outre mesure les demandes de remboursement ; il y aurait dans ce mouvement quelque chose de dangereux non-seulement pour la sécurité commerciale, mais encore pour la sécurité publique. Aussi la majorité de la commission a préféré s’en tenir à la création des billets de 200 francs. Le temps décidera s’il est sage de pousser l’expérience plus loin. M. d’Eichtal, dont la compétence en pareille matière n’est pas douteuse, et que la chambre a écouté.avec une attention soutenue, s’est aussi déclaré pour la création immédiate du billet de 100 francs. Le débat a pris des proportions sur lesquelles on ne comptait pas, et doit se prolonger encore quelques jours.

On invoque souvent l’exemple de l’Angleterre pour exciter à plus de hardiesse l’administration, et les chambres dans certaines mesures économiques et financières. Cependant il ne faut pas oublier qu’en 1844, lorsque le parlement britannique renouvela le privilège de la banque d’Angleterre, sir Robert Peel combattit vivement les théories de quelques économistes, ainsi que la confiance excessive dans le papier-monnaie. Il ne consentit point à considérer la livre sterling comme une simple fiction, ainsi que le soutenaient certains théoriciens ; il y voyait une quantité fixe de métal précieux d’un poids et d’un titre arrêtés, et dont il fallait toujours assurer le remboursement. Aussi sir Robert Peel ne permettait à la banque de lancer des billets dans la circulation que jusqu’à concurrence de son capital placé entre les mains du gouvernement, savoir : 11 millions de livres sterling en fonds publics consolidés et 3 millions en billets de l’Échiquier. La banque ne pouvait désormais émettre des billets pour une somme plus considérable qu’en justifiant qu’elle avait dans ses caves une quantité de numéraire ou de lingots égale à ce supplément, ou en offrant des garanties d’un