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(299,600,000 en 1846) ; le revenu net s’élève à 839,548 livres sterling (environ 21 millions de francs), et le revenu brut (1,978,294 liv. sterl.) n’est plus très éloigné du chiffre de 1839[1].

Les gens prudens pensent peut-être qu’avec une taxe uniforme de 2 pence (21 centimes), la réforme se serait plus tôt et plus sûrement acclimatée en Angleterre. Elle eût en effet, selon toute probabilité, doublé dès la première année le nombre des lettres, et le revenu brut aurait gardé un niveau de 50 à 55 millions de francs ; mais, si l’Angleterre, en préférant la réforme la plus radicale, s’est exposée volontairement à creuser un déficit considérable dans les revenus du trésor, elle en a recueilli des avantages qui compensent et au-delà un sacrifice au demeurant temporaire. Un impôt, qui ne grevait pas seulement les intérêts, mais qui pesait encore sur les affections, a été levé. Les relations commerciales ont pris une nouvelle activité ; les rapports de famille sont devenus possibles malgré les distances, et la correspondance a resserré les liens qui rattachent les absens au pays natal. La reconnaissance publique ne s’y est pas trompée : elle a rangé depuis long-temps M. Rowland Hill parmi les bienfaiteurs de sa patrie et de son époque. La souscription ouverte en faveur de ce novateur ingénieux autant qu’énergique, sans aspirer aux proportions colossales de celle qui est ouverte à l’honneur de Cobden, a réalisé pourtant 16,000 livres sterling. Le gouvernement lui-même n’a fait que se rendre l’interprète du vœu public en appelant M. Rowland Hill à des fonctions qui ont un caractère de spécialité et de permanence.

En 1842, et dans les embarras du déficit, personne n’aurait trouvé extraordinaire que sir Robert Peel, faisant subir une certaine augmentation à la taxe uniforme, la portât d’un penny à 2 pence. Cet homme d’état craignit, avec raison, de troubler l’Angleterre dans la possession des résultats matériels et moraux qu’elle devait à la mesure ; il préféra créer un nouvel impôt. Depuis, plusieurs états ont adopté le principe de la taxe uniforme. Ceux qui ne se sentaient pas le courage d’aller jusque-là ont du moins procédé à la révision de leurs tarifs. La France est la seule contrée où l’on n’ait rien fait encore. Cependant la pensée d’une réforme dans la taxe des lettres ne s’est pas produite chez

  1. En 1847, le nombre des lettres paraît devoir s’accroître dans une proportion plus rapide et plus forte. Grace à l’obligeance combinée de M. Rowland Hill et de M. Piron, je reçois à l’instant un tableau dont tous les chiffres sont authentiques, et qui semble annoncer un accroissement de 35 à 40 millions de lettres pour 1847. Voici le résultat comparatif de trois semaines prises dans les trois premiers mois de 1846 et 1847 :
    1846 1847
    Semaine finissant le 21 janvier 5,832,409 lettres 6,126,954
    «  « le 21 février 5,931,289 6,569,696
    «  « le 21 mars 5,663,100 6,111,773