incessamment. Certes, l’illustre auteur des Méditations poétiques ne prévoyait pas, il y a trente ans, qu’aux jours de sa maturité il considérerait et décrirait les événemens de 1792 à 1794 comme il vient de le faire dans son Histoire des Girondins.
Mais ce n’est pas de ces grands tableaux d’une société secouée jusque dans ses fondemens, ce n’est pas de ces recompositions systématiques ou dramatiques du passé, entreprises dans l’intérêt d’un avenir que l’ambition et l’imagination à la fois rêvent mystérieux et indéfini, c’est d’un point de vue plus rétréci de la grande scène historique que nous voulons nous occuper aujourd’hui. Un écrivain plein de sagacité et de modération, qui accepte la révolution plus qu’il ne l’aime, qui se plaît à juger froidement ce que d’autres ne voient qu’à travers les nuages de l’émotion ou de l’enthousiasme, M. de Barante a, sous la forme modeste d’une notice, tracé, il y a quelque temps, une peinture animée et piquante du gouvernement de la cour de France avant et pendant la révolution. Dans ce cadre resserré, où nous nous plaçons avec lui, nous ne voyons qu’une face des événemens, nous n’apprenons à connaître qu’un parti ; mais il nous semble que nous apprenons à le bien connaître, et, d’ailleurs, il ne serait pas impossible de rattacher tout l’ensemble des événemens aux aventures de la royauté. L’histoire dynastique, pour parler le langage du temps, peut, à la rigueur, servir de centre à l’histoire révolutionnaire.
La révolution (qui ne le sait aujourd’hui ?) est plus qu’un événement politique. C’est une crise dans l’histoire de la société, de l’esprit humain, de l’humanité tout entière. Cependant on pourrait, sans la défigurer entièrement, la réduire à ce qu’elle eut de purement politique, et n’y voir qu’une monarchie qui se transforme. Aussi bien la monarchie tenait en France une telle place, elle avait touché à tant de choses, elle avait si profondément marqué de son empreinte les lois, les mœurs et les opinions, qu’il n’y aurait pas exagération à prendre la royauté comme le symbole de tout l’ancien régime, et à représenter par ses luttes, ses succès et ses revers, toute la destinée de la nation. L’histoire de France est susceptible d’être ramenée à un tableau des vicissitudes du principe monarchique.
Quelles qu’aient été ses origines, quelques combats qu’il ait eus à rendre contre des forces rivales, ce principe paraît de bonne heure, dans notre histoire, destiné à prévaloir. Pendant long-temps il ne fait que grandir. Laissons de côté ses longues et laborieuses luttes, et datons du règne de Henri IV sa victoire définitive. Ce roi, le seul grand homme de sa race, fut le vrai libérateur de la royauté, en la faisant triompher du sein des guerres civiles et des tentatives de révolution. Dès qu’elle cessa d’être en péril, son autorité fut, sinon absolue, du moins prépondérante et décisive. Il régna, non comme un despote qui