ne pouvait ni prévoir ni espérer, le nom du pape est, depuis un an, le symbole du progrès et des réformes, le drapeau sous lequel l’Italie marche à la liberté, sans que rien au monde soit désormais capable de l’arrêter : réformes pacifiques, progrès sans trouble, puisque l’initiative vient des souverains, soutenus par l’opinion publique. Plus d’une nation occupée à défendre en ce moment ses libertés les armes à la main pourrait bien profiter d’un aussi salutaire exemple ; ce serait, sans contredit, le plus sûr moyen d’éviter toute intervention étrangère. Il est vrai de dire que le même bon esprit ne se rencontre pas chez tous les gouvernemens.
Nulle part peut-être cet accord du souverain et du peuple pour la réalisation des améliorations morales et matérielles ne s’est manifesté plus vivement qu’en Toscane ; la Toscane a la première ressenti l’influence du mouvement des états romains, et l’une des premières conséquences de l’agitation des esprits a été l’établissement d’une loi de censure plus libérale. Bien qu’une assez grande tolérance permît l’introduction et la circulation des journaux étrangers, l’action de la presse italienne n’avait pu jusqu’à présent s’exercer que d’une manière clandestine. La promulgation des ordonnances qui ont réglé cette matière dans les états romains a déterminé le grand-duc Léopold à promulguer le décret du 6 mai. Cette mesure dépassait toutes les espérances : aussi fut-elle d’abord accueillie avec une certaine méfiance ; mais, si quelques doutes ont pu s’élever sur les intentions qui l’ont dictée, les circulaires du 1er juin sur le nouveau régime de la presse et les faits accomplis depuis deux mois les ont entièrement détruits. Aujourd’hui la Toscane a une tribune où elle peut discuter les actes du gouvernement, exprimer ses vœux et formuler ses plaintes, et elle en use sans que rien soit encore venu troubler sa sécurité. Plusieurs journaux ont déjà paru, d’autres sont annoncés prochainement. A Florence, l’Alba est rédigée par M. La Farina, littérateur sicilien ; la Patria se publiera bientôt sous la direction de MM. l’abbé Lambruschini, le baron Bettino Ricasoli et l’avocat Salvagnoli. L’Italia a été fondée à Pise par deux professeurs distingués de l’université, MM. Montanelli et Centofanti ; Sienne et Livourne auront aussi leur journal : celui de Livourne, il Corriere di Notizie italenne, est plus spécialement destiné à la défense des intérêts commerciaux et maritimes. Réforme et nationalité, telle est leur devise commune. Enfin une revue mensuelle, la Fenice, sous la direction de M. Vieusseux, paraîtra avant la fin de l’année, et, renouant la tradition interrompue de l’ancienne ontologie de Florence, résumera le mouvement littéraire de la Toscane et de toute la péninsule.
L’établissement d’un régime nouveau pour la presse ne pouvait être un fait isolé. Le gouvernement du grand-duc l’a sagement compris. Ainsi que l’a fait en Piémont le roi Charles-Albert, il a songé à donner un code à la Toscane. Un motu proprio du 31 mai a institué deux commissions chargées de rédiger un code civil et un code pénal. La commission du code pénal a pour mission expresse de mettre un frein à la direction arbitraire de la police. Le même décret renferme la promesse d’une consulte d’état, et, dans une communication ministérielle adressée au surintendant-général des communes, le gouvernement annonce, pour le mois d’août prochain, une assemblée des provéditeurs des cinq chambres (arrondissemens) dont se compose le grand-duché, des gonfaloniers (maires) des principales villes, et de plusieurs notables, au choix du sou-