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prudent de dédaigner un pareil avis. Le clergé consentit à donner sur ses biens une hypothèque de 2 millions de piastres ; le haut commerce et les riches propriétaires offrirent un prêt de 500,000 piastres, et s’engagèrent à fournir une somme égale dans le délai de quinze jours d’abord, puis de mois en mois.

Enfin, le 28 septembre, Santa-Anna, après être allé entendre une messe solennelle dans l’église de la Vierge de Guadalupe et avoir imploré la protection spéciale de la patrone du Mexique, se dirigea, à la tête de deux corps d’infanterie et de huit pièces de canon, vers San-Luis Potosi, où il allait enfin jeter le masque de modestie qu’il avait cru devoir garder jusqu’alors,


IV.

Huit jours avant le départ de Santa-Anna, l’armée des États-Unis, forte de 6,000 hommes, occupait militairement les abords de Monterey. Capitale de l’état de Nuevo-Leon, cette ville est une des plus pittoresques du Mexique ; l’état même de Nuevo-Leon n’est pour ainsi dire qu’un vaste jardin. Monterey est bâtie dans une vallée assez étroite, au pied des dernières montagnes de la Sierra Madre, à deux cent quarante lieues environ de Mexico, à cent lieues de Matamoros. Deux cerros très élevés dominent la ville : l’un, qui ressemble à une selle, a été nommé la Silla ; l’autre, qui a la forme d’une mitre, s’appelle la Mitra. Les trois endroits qu’on visite de préférence à Monterey sont un petit lac nommé Ojo de Agua, que de beaux arbres couvrent d’un dôme impénétrable ; le pont de la Purisima, jeté au-dessus d’une rivière formée par le trop plein du lac, et qui unit l’ancienne partie de la ville à la partie moderne ; enfin le bois de Santo-Domingo, vaste couvert à l’ombre duquel une armée tout entière peut s’abriter. Si Monterey n’était pas exposée aux incursions des Indiens, qui dans l’hiver viennent ravager les environs, nul doute que, grace à la richesse de son territoire, cette ville n’eût pris un accroissement beaucoup plus rapide.

La garnison de Monterey, au moment où les Américains vinrent assiéger cette place, se composait d’environ 4,000 hommes. On attendait de jour en jour l’arrivée de la 4e brigade, aux ordres du général Ponce de Leon, qui s’avançait à marches forcées. Deux partis de cavalerie auxiliaire battaient la campagne, et ne laissaient pas de causer quelques dommages à l’ennemi. Le soldat mexicain était plein d’ardeur, et son enthousiasme s’était communiqué aux habitans de la ville. On cite même à ce propos un trait singulier. Une jeune femme, appelée doña Jesus Dosomantes, se présenta à cheval au général Ampudia, vêtue d’un uniforme de capitaine ; elle demanda à être reçue dans l’armée. En vain le colonel Uraga, à qui Ampudia l’adressa, lui représenta les