— Je conçois son saisissement, répondit tout haut le vieux seigneur, il est juste de lui laisser le temps de se remettre ; et, après un silence, il ajouta, en s’adressant à Clémentine : — Ma nièce, puisque vous savez déjà ma volonté, vous devez en être fort aise, je pense ; c’est dans quinze jours que je vous marie avec votre cousin le baron de Barjavel.
Elle baissa la tête en frissonnant et sembla réunir toutes les forces de son esprit pour répondre ; mais sa voix s’éteignit dans une espèce de sanglot.
— Assurez donc mon oncle de votre obéissance s’écria Mlle de Saint-Elphège en lui prenant la main pour l’amener aux genoux du baron, qui se disposait à la relever et à l’embrasser ; mais elle fit un pas en arrière et tourna les yeux du côté de la porte, comme si elle eût été tentée de s’enfuir.
— Clémentine, ma chère enfant, reprit la vieille fille avec inquiétude, remerciez donc mon oncle de ce qu’il fait pour vous, dites-lui que vous êtes contente de lui obéir.
— Laissez-la, ma nièce, interrompit le vieux seigneur d’un air d’indulgence ; cette retenue sied à une fille de son rang. Vous allez voir que le baron manifestera ses sentimens d’une autre manière. Mon vieux La Graponnière, fais-lui dire de se rendre auprès de moi sur l’heure.
— Oh monsieur, je vous en supplie… auparavant écoutez-moi, interrompit Mlle de l’Hubac, et, se jetant aux pieds du marquis, elle ajouta : — Je ne me marierai pas avec mon cousin… non-jamais…
— Ah, grand Dieu ! que signifie ceci s’écria Mlle de Saint-Elphège : elle perd le jugement ! Mademoiselle, reprenez vos esprits, considérez à qui vous parlez et la situation où vous êtes.
— Me préserve le ciel de manquer au respect que je vous dois, répondit Clémentine tout en larmes ; ah ! ma tante, ah ! monsieur, excusez-moi !
— Vous serez pardonnée, si vous rétractez sur-le-champ ce que vous venez de déclarer lui dit sa tante Joséphine.
— Ah ! non, non, jamais ! s’écria-t-elle avec l’accent d’une résolution désespérée.
— En ce cas, il faut expliquer les motifs de votre refus, dit la vieille fille en élevant la voix ; parlez, mademoiselle, achevez de faire connaître vos sentimens, manifestez les penchans de votre cœur, déclarer pourquoi vous refusez ce mariage. — Et comme Clémentine se taisait, effrayée de ces interpellations violentes, elle ajouta ! Il n’est pas difficile de pénétrer ce mystère, et, puisque vous vous obstinez à garder le silence, je vais dire à mon oncle le motif secret de votre désobéissance…..
— Je vais, de moi-même, le lui apprendre, répondit Mme de l’Hubac, à laquelle cette espèce de menace rendit quelque énergie ; je me sens