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Page:Revue des Deux Mondes - 1848 - tome 21.djvu/960

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qu’une marge insignifiante pour toute faveur qui serait restreinte à un simple abaissement de droits. Sera-ce la suppression de la contrefaçon ? Mais ce n’est là qu’une restitution pure et simple que la Belgique ne peut tarder à nous accorder, si le nouveau gouvernement de la France se préoccupe tant soit peu des intérêts de la presse nationale. Sera-ce enfin le retrait de l’énorme surtaxe du 14 juillet 1843, qui a doublé le droit d’entrée pour nos tissus fins de laine, et que la convention du 13 décembre 1845 a réduite à peine d’un quart ? Cette surtaxe n’a été établie que par une sorte de guet-apens commercial, par une dérogation judaïque au principe d’où était sortie la convention de 1842, et, si l’on paie un bon procédé, on ne paie pas une simple réparation. La Belgique s’est d’ailleurs laissé enlever d’avance le mérite de cette réparation. La surtaxe dont il s’agit a donné un tel élan à la contrebande, éminemment facile dans un pays qui n’a qu’une seule ligne de douanes pour protéger des frontières plates et nues, que vingt-cinq kilogrammes de mérinos, par exemple, d’une valeur moyenne de 900 francs[1] et passibles, d’après le tarif actuel, d’un droit d’environ 79 francs, sont introduits en fraude moyennant dix francs. En supposant que le bénéfice de l’assureur soit le double de celui du colporteur, le fabricant français se trouve par le fait aussi favorisé qu’il le serait par un droit équivalant au 3,33 pour 100 de la valeur. Ce n’est donc, en réalité, qu’au-dessous de ce droit minime de 3,33 pour 100 que l’abaissement du tarif constituerait une faveur réelle, et cette marge de réduction est encore insuffisante. La France a certes le droit de se faire acheter plus cher le salut de l’industrie linière belge, lorsque la Belgique, pour épargner un simple mécompte à son industrie métallurgique, n’a pas hésité à bouleverser tout son système douanier au profit du Zollverein.

Si, dans les limites d’une simple réduction de tarif, la Belgique ne peut offrir à nos principales exportations que des faveurs sans portée, quel moyen lui reste-t-il de nous payer l’agrandissement de son débouché linier ? Un seul : l’abolition pure et simple du tarif en ce qui concerne ces exportations. Ici, la faveur serait considérable ; car la valeur réelle de ce dégrèvement s’accroîtrait tout à coup de la prime que plusieurs des produits mentionnés paient actuellement aux fraudeurs. Restent les difficultés d’application. Si l’industrie linière devait être seule à profiter des bénéfices de la réciprocité, la mesure dont il s’agit serait impossible : malgré son importance numérique, cette industrie, qui, à proprement parler, n’a pas de représentation directe dans les chambres, ne serait pas de force à vaincre les résistances combinées des industries lésées, des associations contrebandières et des nombreux

  1. Je prends cette moyenne entre 25 francs, estimation du tarif belge, et 45 francs, estimation du tarif français.