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en chiques, 20 et 22 fr. ; autres, 200 et 220 fr. C’est bien pis pour le cristal de roche, qui, sujet à un droit de 62 fr. et 67 fr. 60 c. à l’état brut, est frappé d’une prohibition absolue lorsqu’il est ouvré. Il n’est pas jusqu’aux pierres ouvrées, en chiques ou autres, qui ne soient sujettes à des droits de 10 et 11 fr. les 1.00 kil., ou de 15 pour cent de la valeur. Les meules à moudre ou à aiguiser, que la loi distingue en douze espèces, selon les dimensions, sont sujettes à autant de droits différens, qui vont de 10 c. à 7 fr. 50 c. la pièce. On n’a pas même épargné les pierres et terres servant aux arts et métiers, telles que pierres à aiguiser, spath. castine, pierres à feu, bol d’Arménie et terre de Lemnos, terre à pipe, tripoli ou alana, craie, groison, pierre ponce, pierre de touche, talc brut, pierres ferrugineuses, derle ou terre à porcelaine, cailloux à faïence ou à porcelaine, ocres et autres pierres ou terres non dénommées. Les droits, qui varient de 5 c.[1] à 9 fr. 90 c. les 100 kil., peuvent être considérés comme faibles dans certains cas, comme assez élevés dans d’autres, mais toujours déplacés et abusifs. On n’a pas épargné davantage les matériaux à bâtir, même la chaux, le plâtre, les moellons et déchets de pierre et le sable commun. C’est le délire de la protection ou le côté ridicule de la fiscalité. La marne, qui ne sert guère qu’à l’amendement des terres, paie également un droit de 10 c. les 100 kil. ; le code de la douane ne dit pas de quelle manière on doit en constater le poids, et c’est fâcheux. Sur le soufre, le droit varie, selon l’état dans lequel il se présente, de 25 c. à 14 fr. 30 c. les 100 kil. Enfin, les bitumes, sans en excepter le goudron minéral provenant de la distillation de la houille, paient également des droits qui, sur les cinq articles distincts qu’ils présentent, varient de 10 cent. à 7 fr. 70 cent. les 100 kilogrammes.

Il ne faut certainement pas une grande force de raisonnement pour comprendre combien toutes ces taxations sont abusives, et combien il importe que cette partie du tarif soit dès à présent, sinon entièrement biffée, au moins réduite à deux ou trois articles, en attendant une suppression totale. Il y a de cela plusieurs raisons dont chacune est décisive. La première, c’est que, la plupart des articles qui forment cette série étant des produits naturels que la terre donne inégalement et par places, sans qu’il soit possible de les faire naître à force d’art A, ils n’existent pas, il faut bien, quoi qu’on fasse, se résoudre à les prendre ou ils se trouvent, et qu’ici par conséquent le système protecteur, en supposant qu’il puisse dans certains cas être utile pour favoriser l’essor d’une industrie naissante, demeure nécessairement sans effet. Si l’on considère en outre l’extrême utilité de ces produits, dont l’usage est plus ou moins nécessaire en tout pays, on comprendra combien il

  1. Sur la castine, les pierres à chaux brutes et les moellons et déchets de pierre, les droits ont été réduits à 1 centime les 100 kil. par la loi du 9 juin 1845. Pourquoi pas un affranchissement absolu ? On n’a pas eu le courage de le prononcer.