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fondeurs eût-elle été entièrement exilée de l’Angleterre, elle se serait transplantée partout ailleurs plutôt qu’en France. Aussi, quoique notre importation en minerai se soit graduellement accrue depuis 1842, elle ne s’est encore élevée, en 1846, qu’à 1,100,000 kilogrammes. C’est dire assez que l’industrie des fondeurs ne fait guère que poindre en France, tandis qu’elle aurait pu avoir dès à présent une grande importance, si on avait adopté un régime plus libéral. Au reste, l’Angleterre commence à comprendre la faute qu’elle a faite en 1842, et il est probable qu’elle la réparera bientôt. Soit qu’elle rétablisse purement et simplement le régime antérieur à cette époque, soit qu’elle en adopte un autre encore plus large et mieux en harmonie avec ses nouvelles idées, elle ne tardera pas à recouvrer ce qu’elle a perdu. Quoi qu’il arrive, ce que la France aura de mieux à faire sera toujours de recevoir le cuivre des pays qui le fournissent avec le plus d’abondance et au meilleur prix. Se raidir, comme elle le fait, contre le cours naturel des choses, c’est se condamner à de très grands sacrifices pour obtenir de très médiocres résultats.

Malgré la nouvelle confirmation qui a été donnée, en 1845, à ce faux principe des droits différentiels en faveur de la navigation lointaine, nous établirions donc sur les cuivres un droit uniforme, sans distinction de provenances, comme étant à la fois le plus favorable au commerce et le plus productif pour le trésor public. Ce droit, nous le fixerions, sur le cuivre de première fusion, soit pur, soit allié de zinc et d’étain, au chiffre le plus élevé du tarif actuel, 2 francs les 100 kilogrammes par navires français, car ce dernier chiffre même est modéré, si on le compare à ceux qui s’appliquent aux fers. Alors la recette, qui n’a été en 1845 que de 211,304 fr., s’élèverait tout au moins à 300,000 fr.

Si le droit actuel, même le plus fort, est encore assez modéré en ce qui concerne le cuivre de première fusion, il n’en est pas de même aussitôt que cette matière a reçu un commencement de main-d’œuvre. Ainsi le cuivre pur laminé, en barres ou en planches, ne paie pas moins de 50 fr. les 100 kilogrammes par navires français et 55 fr. par navires étrangers. Battu, le même métal paie 80 et 86 fr. 50 cent. ; filé, selon qu’il est teint ou non teint, il est soumis à des droits de 100 fr. et 107 fr. 50 c., ou de 286 et 302 fr. 50 c. Même exagération pour les cuivres alliés de zinc et d’étain. Il résulte de là, en faveur du petit nombre d’industriels qui laminent ou battent le cuivre, particulièrement pour l’usage de la marine, des privilèges dont ils abusent. Ils rançonnent les armateurs, et de plus, dans un grand nombre de localités, les produits, au lieu de s’améliorer, se détériorent de jour en jour : on ne s’en aperçoit que trop dans le doublage de nos navires. C’est une autre conséquence fort naturelle de l’exagération des droits sur les cuivres ouvrés, que l’importation en est presque nulle : le