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le serment à ladite charge par toutes voies dues et raisonnables, dont il a protesté d’attentat et appelé en adhérant ; et pour ce qu’il n’a voulu le faire, a été icelui Lambert mis en arrêt. »

Ils ne furent pas les seuls. On a enregistré les refus successifs d’une dizaine d’autres qui sous différens prétextes tâchaient d’échapper à l’échevinage. On les harcelait sans pitié ; ceux qui s’excusaient sur leurs infirmités, on les faisait visiter. C’est qu’en effet la charge d’échevin obligeait le bourgeois à délaisser pendant cinq ans ses affaires particulières pour celles du public. C’étaient la plupart « gens mécaniques, » peu expérimentés dans les affaires ; les malheureux, ne sachant comment s’en tirer, priaient les magistrats orléanais de leur faire savoir comment il fallait s’y prendre. D’une autre part, quantité d’habitans de la ville faisaient journellement des menaces à MM. les échevins, et l’on était obligé de rendre un édit pour menacer de la hart ceux qui se conduisaient ainsi. Quand la ville était épuisée, qui était chargé d’avancer les deniers pour elle ? les échevins. Chacun alors se cachait « aux champs » on les relançait ; amende de 10 et 20 sols tournois pour quiconque ne se présentait pas aux assemblées.

Enfin on crut devoir adresser une supplique au roi Charles IX qui, l’an 1572, six semaines avant la Saint-Barthélemy, rendit un édit par lequel, entre autres modifications importantes, le nombre des échevins était réduit de douze à huit ; la durée de la charge de cinq ans à deux. Les gens de longue et de courte robe furent susceptibles d’être élus, et l’on s’arrangea de façon à réélire toujours deux des fonctionnaires sortant de charge, pour que leur expérience guidât l’inexpérience des conscrits-magistrats.

Ne rions pas de ces efforts pénibles et de ces essais chancelans d’administration municipale. Nos aïeux faisaient leur éducation, ils y réussirent ; entre 1660 et 1680, ils parvinrent à se donner un maire.

Monseigneur Charles de Bourbon, gouverneur d’Orléans et de Chartres, ayant fait instituer une enquête et adressé diverses questions aux bailli et magistrats de Chartres, il lui fut répondu que dans la ville il n’y avait pas de maire, etc., etc. On différa tellement les délibérations à ce sujet, les affaires furent si lentes qu’en 1570, dix ans après, rien encore n’était accompli. En 1576, on crut un moment que tout allait se décider ; enfin des lettres du roi avaient été obtenues qui autorisaient l’érection et création d’un maire ; on s’assemble ; la discussion sur la vérification et l’homologation de la cédule royale arrête encore l’assemblée. Le procureur du roi requiert et demande communication de cette pièce. M. Noël de Bunes, notaire, « exhibe une grande feuille de papier qu’il dit être la minute de ladite procuration. » Le procureur veut s’en saisir ; le notaire la lui reprend. Un coin de papier reste entre les mains du premier, et tout est interrompu. Trois ans après