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ses propres expressions, sa vie entière. Devant cet exposé si ferme et si précis, nous ne croyons pas qu’il puisse rester un doute aux lecteurs les plus prévenus. Au reste, la presse étrangère n’a pas attendu la publication de la Réponse de M. Libri pour prendre sa défense. Une lettre chaleureuse de M. le comte Mamiani, un article de M. Guerrazzi, insérés dans le journal l’Ehoca de Rome, ont devancé la réfutation péremptoire que vient de publier M. Libri. Aujourd’hui, cette réfutation est l’objet d’appréciations favorables dans la presse française. Un recueil anglais justement estimé, l’Athenaeum, vient de consacrer à la réponse de M. Libri un examen où il condamne, en termes sévères, la publicité officielle donnée au rapport de M. Boucly. Ce qu’il y a d’anormal et d’illégal dans un fait pareil blesse à bon droit ce vigoureux sentiment des convenances légales, qui est le trait distinctif du caractère anglais. « Nous commençons par affirmer, dit l’auteur de l’article publié dans l’Athenaeum, que, selon notre opinion, M. Libri est devenu l’accusateur, qu’il a changé de place, et que c’est maintenant à ceux qui l’ont attaqué de se défendre contre une imputation grave, très grave, car il s’agirait de la ruine d’un adversaire politique, qu’on aurait déshonoré par l’exploitation de récits vagues qui ne comptent pour rien devant les tribunaux. » - « M. Libri, est-il dit plus loin, affirme qu’ayant été pendant douze ans l’adversaire de M. Arago, il n’a pas osé rester en France du moment où son ennemi était au pouvoir, et, sans ce qui s’est passé, nous aurions pu soupçonner M. Libri d’avoir mal jugé M. Arago. » Pour nous, malgré ce que nous savons des tristes haines qui peuvent agiter le monde littéraire ou scientifique, nous ne pouvons admettre comme fondées les insinuations du journal anglais. Nous pensons qu’il est des faiblesses auxquelles les plus vifs ressentimens ne sauraient faire descendre un grand esprit. M. Libri n’aura pas vainement rappelé l’époque où M. Arago, passant à Florence, visitait la collection qui devait plus tard fournir un prétexte à de si odieuses calomnies, et, loin de prêter créance aux soupçons de l’Alhenaeum, nous aimons à croire, au contraire, que M. Arago voudra s’honorer en ne laissant pas sans réponse l’appel fait à sa mémoire.



REVUE LITTERAIRE ET DRAMATIQUE.




Nous devons louer l’Académie française de ne pas s’être laissé détourner de ses travaux par les émotions politiques et de s’être réunie en séance publique pour la réception de M. Ampère, tout comme elle eût fait autrefois. Ce spectacle était à la fois triste et consolant : triste, parce qu’il nous a rappelé combien nous sommes loin d’une époque où ces aimables exercices de la pensée figuraient en première ligne dans les préoccupations d’une société polie ; conso-