nourriture et pour dissimuler son oisiveté habituelle. Les noirs, pour lutter contre cette législation, se prêteront une assistance mutuelle ; ils trouveront toujours parmi eux quelqu’un qui affirmera que le délinquant est à son service, domicilié chez lui, ou associé à son industrie. Ce serait donc se faire illusion que de supposer qu’on atteindra le vagabondage avec une pareille législation.
La seconde lacune n’est pas moins regrettable. Il est impossible que les tribunaux exercent des poursuites contre les vagabonds et les gens sans aveu, tant qu’on n’aura pas établi dans chaque colonie un ou plusieurs ateliers disciplinaires. Ce n’est là qu’une affaire d’argent, mais encore est-il indispensable d’y pourvoir, ce que ne fait pas le décret du 27 avril. Le gouvernement anglais nous donne de nombreux exemples des précautions à prendre pour réprimer le vagabondage. On ne saurait trop consulter les précédens qu’il nous fournit à cet égard. Un acte du gouverneur commandant en chef d’Antigoa, Montserrat, la Barbade, etc., répute « fainéant (idle) et débauché, et punit comme tel, non-seulement tout individu pouvant pourvoir en tout ou en partie à sa subsistance et à celle de sa famille, et qui volontairement refusera ou négligera d’y pourvoir, mais encore tout individu prétendant trafiquer, errant dehors, logeant sous un hangar, appentis, ou dans un bâtiment désert ou inoccupé, ou dans un moulin, ou manufacture de sucre, ou dans des dépendances de plantations, ou dans une pièce de canne, etc. » L’esprit pratique des Anglais ne craint pas d’énumérer les cas où, pour le juge, il y aura présomption suffisante de vagabondage. A moins de laisser nos tribunaux désarmés, nous devons imiter l’Angleterre, et faire pour nos colonies une législation exceptionnelle et spéciale, plus en rapport que la législation métropolitaine avec leur état présent.
Des modifications sont également nécessaires au contrat de louage, car nous ne pouvons admettre qu’on règle les relations du maître et de l’ouvrier par les dispositions du code civil. Des règlemens particuliers doivent intervenir, si l’on veut que le travail de la terre ne soit pas abandonné. Il faut que ces règlemens distinguent entre l’engagement contracté pour un service urbain et celui qu’on forme pour la culture des habitations. Ce dernier exige plus de stabilité, plus de certitude, par conséquent des circonstances nettement définies pour la rescision de droit de la convention, et, en cas d’inobservation, des pénalités plus fortes. La culture de la canne réclame, on le sait, des soins constans ; le moindre retard dans la plantation, le sarclage ou la coupe, peut compromettre le revenu entier d’une propriété. La garantie du planteur qui a voulu s’assurer des bras, soit pour cultiver son champ, soit pour rentrer ses récoltes ou fabriquer ses cannes, ne peut se rencontrer dans un dédommagement en argent que l’on condamnerait