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avec les troupes, l’autre s’est jointe aux paysans armés de faux accourus sans doute de la frontière hongroise, qui n’est qu’à quelques heures de Vienne. Le ministre de la guerre, le vieux général Latour, d’une famille d’origine française, a été massacré avec les mêmes horreurs de cannibales que nous dénoncions tout à l’heure. L’assemblée paraît être dominée par la populace victorieuse, mais ne céder qu’à regret à la violence. C’est un 24 juin triomphant. Les troupes ont évacué la ville, qui reste livrée à la terreur. L’empereur a pu quitter le château de Schoenbrünn et gagner la forteresse de Linz, sur le haut Danube. Il se rapproche ainsi de l’armée de Radetzky et d’Inspruck, son premier refuge. On dit aussi que les députés bohèmes veulent le conduire à Prague. Dans les deux cas, la position de Jellachich, privé des secours sur lesquels il avait compté, reste fort compromise entre l’insurrection hongroise et la démagogie victorieuse à Vienne. La proclamation que l’empereur a laissée en partant, qu’elle soit son œuvre ou celle d’un autre, est d’une ame honnête et doit rester, parce qu’elle ne contient que des choses simples, dites avec l’accent de la vérité. C’étaient les peuples qui disaient autrefois aux rois la vérité ; que les peuples l’écoutent et l’apprennent à leur tour de ces rois.


Au château de Schœnbrünn, 7 octobre 1848.

J’ai fait tout ce qu’un souverain pouvait faire pour le bien ; j’ai renoncé au pouvoir absolu que m’avaient légué mes ancêtres. Au mois de mai, forcé de quitter le château de mes pères ; je suis revenu sans autre garantie que ma confiance dans mon peuple. Une faction, forte par son audace, a poussé les choses jusqu’à la dernière extrémité. Le pillage et le meurtre règnent à Vienne, et le ministre de la guerre est tué. J’ai confiance en Dieu et en mon droit ; je quitte ma capitale pour trouver les moyens de porter secours au peuple opprimé. Que ceux qui aiment l’Autriche et sa liberté se pressent autour de l’empereur ! »