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ignoraient, il est vrai, combien de troupes gardaient les vallées voisines ; mais la population, exaltée par leur présence, allait leur venir en aide, et qui sait ? Peut-être leur marche victorieuse ne s’arrêterait-elle qu’à Trente.

Les débuts de l’expédition justifièrent cette confiance. Malgré le misérable aspect des volontaires, ils furent salués sur toute la route par de sympathiques acclamations. Les montagnards du Tyrol avaient demandé avec tant d’instance un secours aux Lombards ! Ce secours arrivait enfin. Cette première colonne n’était que l’avant-garde d’un corps bien plus considérable. Leur cause était désormais confondue avec celle des Lombards, qui consentaient à les traiter en frères, à les considérer comme des enfans de la même patrie. L’accueil qu’ils firent aux compagnons de Meneghelli fut des plus affectueux. Toutefois la joyeuse confiance des volontaires fit bientôt place à l’inquiétude. Ils visitèrent leurs munitions et s’aperçurent que ni cartouches ni balles ne pouvaient servir. Il fallut fabriquer, avec l’aide des montagnards, de nouvelles cartouches. Deux jours furent ainsi perdus, et on ne put se procurer que douze cartouches pour chaque soldat. C’est avec pareilles munitions que cent quatre-vingt-cinq hommes pénétraient dans un pays occupé en grande partie par l’ennemi, et se préparaient à combattre des forces qu’il était impossible d’évaluer à l’avance.

La catastrophe qu’il était dès-lors facile de prévoir ne se fit pas attendre. Le 19 avril, la colonne Scotti-Meneghelli, qui était parvenue dans la vallée de Non, se vit tout à coup entourée par mille hommes d’infanterie ennemie, soixante chevau-légers et quatre pièces d’artillerie. Ces forces étaient descendues sans obstacles des montagnes qui séparent la vallée de Non du Tyrol autrichien. Profitant de la nuit, une partie de ces troupes avait traversé l’étroit défilé qui sépare les deux vallées et avait occupé les montagnes du côté sud-ouest, afin d’envelopper complétement les volontaires. Que pouvaient de mauvais fusils contre des pièces de canon ? Les volontaires se décidèrent à s’ouvrir un passage à la baïonnette. Sortis, après des prodiges de valeur, du cercle où ils s’étaient vus renfermés, ils se retirèrent sur une montagne où ils se croyaient en sûreté, mais d’où il leur était difficile de regagner les lieux occupés par leurs frères d’armes. Ils comptaient maintenir leur position jusqu’à ce que l’ennemi fût appelé ailleurs soit par des ordres supérieurs, soit par l’approche des autres corps de volontaires. Leur espoir fut trompé. Dès la matinée du 20, la colonne Scotti-Meneghelli aperçut devant elle, à peu de distance du sommet de la montagne, l’ennemi rangé en ordre de bataille. Cette fois il ne s’agissait pas de s’ouvrir un passage à la baïonnette, puisque les Autrichiens ne se présentaient que d’un seul côté, et que, de l’autre, la retraite, quoique difficile à cause des accidens du terrain, était libre. Les mêmes